Blog - Paul Watson arrêté
Il y a deux jours, l’activiste Paul Watson a été arrêté au Groenland (Danemark). Il risque de terminer ses jours dans une prison … japonaise. De quoi y voir encore une inversion des valeurs.
Ses détracteurs le qualifient d’éco-terroriste, comme notre cher Darmanin et sa clique vis à vis des soulèvements de la terre et autres mouvements écologistes dits «radicaux». Le terme même ne devrait pas poser débat : Les vrais éco-terroristes ne sont pas ceux qui défendent le vivant, la terre mais ceux qui la mettent à sac par leur pollution, leur exploitation intensive, l’épuisent jusqu’à ce cette planète devienne inhabitable non seulement pour l’Humain mais pour tant d’autres espèces animales et végétales. Le terme est justement issu du FBI qui souhaitait lutter sous Reagan contre les mouvements des droits des animaux (Animal Liberation Front par exemple…). Et Paul Watson était déjà dans le viseur à cette époque…Qui a raison étymologiquement ? L’écologie est un terme parlant d’interactions et de relations entre les êtres vivants et par extension tout le vivant. Et une des définitions est bien l’étude des équilibres et de l’harmonie dans le vivant. Être terroriste dans ce domaine est donc bien mettre en danger et terroriser le vivant. Et Paul Watson ne met aucunement en danger le vivant, il le protège.
Car son action démarre dans les années 70 en étant à l’origine de Greenpeace (même si l’organisation qui a beaucoup changée, en dément la fondation). Ce marin canadien, ex garde-côte a débuté son action écologiste par des protestations contre les essais nucléaires dans des îles aux confins de l’Alaska. C’est en 1975 qu’il rentre en conflit avec ses amis de Greenpeace en prônant des actions plus directes pour protéger les baleines. En 1977, il est exclu de Greenpeace et crée Sea Shepherd (ou plutôt la Sea Shepherd Conservation Society). S’il défraie parfois la chronique par ses actions contre les baleiniers en mettant son bateau entre les animaux chassés et les chasseurs, ce n’est qu’avec l’émission Whale Wars (Justiciers des mers en français) qu’il se fait connaître du grand public. Les actions de son association ne se limitent pas à ce sujet (sur-pêche, pollution marine, captivité des cétacés, protection des requins…) mais c’est le principal mode d’action. L’association a des antennes dans le monde entier, dont une en France. Elle possède jusqu’à 9 navires dont certains furent sponsorisés par des célébrités : Le Sam Simon est issu du don d’un des créateurs des Simpsons. Son emblème, dérivé des insignes pirates est maintenant connu et visible dans beaucoup de manifestations animalistes.
Restent les controverses : S’il est sur la liste rouge d’INTERPOL, c’est à cause d’une plainte du Japon. Son organisation a coulé des baleiniers islandais, sans mettre en danger les équipages. Elle a déjà utilisé des mines sous-marines pour endommager les baleiniers et les obliger à rebrousser chemin, bloqué les hélices avec des cables, versé de l’acide butanoïque (un répulsif non toxique) pour rendre la viande de baleine impropre à la consommation… L’ONG parle du respect des conventions internationales pour justifier ses actions et notamment les accords sur la chasse à la Baleine, tolérée pour raisons scientifiques, … des raisons évidemment non respectées puisque c’est bien une exploitation commerciales qui est pratiquée par quelques pays : Japon, Norvège, Islande …Danemark, notamment. Beaucoup de pays soutenant la chasse à la baleine au sein de la commission baleinière internationale ne la pratique pas et sont sujets à la corruption. Si 40 000 baleines ont été encore tuées depuis la mise en place du moratoire de 1985, Sea Shepherd revendique 5000 sauvetages par ses actions.
Une autre controverse vient de la personnalité même de Paul Watson. Non, pas de viol ou autre scandale sexuel, je vous rassure. Lors du tremblement de terre de 2011 au Japon, Watson écrit un poème qui suggérait que c’était la vengeance de Neptune. Il corrigea ses propos en exprimant ses condoléances envers le peuple japonais. Une scission de l’association a été faite en 2022, la branche américaine débarquant son fondateur pour des raisons de politique interne et d’orientation plus mercantile de la branche US (il faut être donc plus consensuel…). Aujourd’hui Paul Watson reste soutenu par les antennes françaises, anglaises et brésiliennes. Certaines associations regrettent que son jusqu’au-boutisme ait fait capoter des accords qui permettaient de limiter la chasse à la baleine sans l’interdire. Mais malgré le fait qu’il soit sous la menace d’une arrestation (il fut arrêté aussi en Allemagne puis relâché), le marin a repris la mer pour poursuivre son oeuvre. Il était justement au Groenland pour cela, visant un immense baleinier … japonais, avant que les autorités viennent l’arrêter.
A lui seul, il est le symbole de ce qui divise toujours dans l’activisme et la politique. Demander seulement poliment ne suffit pas à obtenir des avancées. Mais se contenter d’actions coup de poing peut aussi être contre-productif. Sea Shepherd ne s’est pas contenté non plus de ces actions si médiatiques et participe à des actions et négociations de fond, au coté de bon nombre d’associations. La notice d’INTERPOL (par ailleurs critiquée aussi pour des notices abusives dans d’autres domaines, sous l’influence de sa direction) est évidemment là pour dissuader d’autres activistes du même type d’agir. En laissant Paul Watson en prison, on ne dissuade pas seulement les actions pour préserver les baleines mais on s’attaque aux mouvements écologistes et même politiques au sens large. C’est du même type que faire condamner des syndicalistes pour des dégradations de machines, séquestrations pacifiques de dirigeants, arrachage de chemise, etc… Sans Paul Watson, il y aurait eu plus de baleines tuées, mais aussi le sujet ne serait pas sur la table lors de colloques sur l’environnement. Il est loin le temps où c’était mis en avant par des associations comme Greenpeace ou la fondation Brigitte Bardot. On se contente de moratoires pour ne pas froisser sur d’autres sujets. Long est encore le chemin…
Officiellement, le président Macron dit s’intéresser au sort de l’activisme….hum, on connaît sa parole. Une pétition est en ligne en France. On ne doit pas laisser le capitaine Watson en prison !