Cinéma - Beetlejuice, Beetlejuice de Tim Burton (2024)
Il aura fallu 26 ans pour boucler la boucle Beetlejuice, pour Tim Burton. Et évidemment à peu près ça aussi pour moi, puisque je suis fan du réalisateur. Mais je craignais ce numéro 2, après les errements du réalisateurs ces 15 dernières années et la tentation du remake.
C’est un des premiers films de Tim Burton, son deuxième pour être exact (sans compter ses courts) et il est plus personnel. Déjà il avait pu développer son univers si personnel entre gothique horreur et pop-culture. Pourtant, il n’en avait pas été l’auteur (il le sera d’abord sur Edward aux mains d’argent) du scénario. Mais tout était là pour ce premier opus : Un univers de comédie horrifique parlant d’au-delà, de mort donc, mais avec la truculence des films d’animation les plus délirants, tout en étant fait avec les trucages de l’époque, c’est à dire anima-tronics, maquillage et stop motion. Le personnage de Beetlejuice (Betelgeuse) est de Michael McDowell et Larry Wilson, et tout commence pourtant par une jolie histoire de couple heureux et d’emménagement dans une belle maison. Sauf que ce couple meurt dans un accident de la route et se retrouve condamné à hanter cette maison. Mais on ne peut pas dire qu’ils soient préparés pour cet au-delà… ou pour être méchants avec les nouveaux propriétaires de la maison. C’était sans compter sans les conseils de Beetlejuice, étrange bio-exorciste…
On ne reviendra pas sur la genèse du projet mais l’histoire donnera aussi une série animée (1989-1991) qui m’a aussi permis de mieux connaître tout l’univers développé autour du film. Oui, j’ai fait un peu à l’envers mais le premier opus fut parmi mes films cultes de mes premières années de cinéphile et je fus un inconditionnel de tous les Tim Burton jusqu’à «Alice aux pays des merveilles»… «Dumbo» m’avait laissé un peu sur ma faim, et rétrospectivement, le Planète des singes avait déjà montré quelques faiblesses. J’avais pourtant aimé la tentative «Big Fish», pas suivie par son public. Avec tout ça, j’avais un bon feeling parce que justement Burton n’est jamais aussi à l’aise que dans ce type d’univers, si proche de lui. Même s’il n’a pas écrit le scénario du premier, il l’a mis en images et c’est un film très visuel avec déjà quelques clins d’œil dont je n’avais pas alors toutes les références cinéphiles.(voir 1ère chronique)
Rien que la maison qui est le terrain de la rencontre entre le monde réel et celui des morts a quelques rapports avec des classiques du cinéma d’horreur et d’épouvante. Si je vous dis que les scénaristes ont bossé dans l’entourage d’un certain Hitchcock..Il y avait aussi des clins d’œil à la «famille Adams» (au point que Angelica Houston sera envisagé…et elle en tournera l’adaptation ciné 3 ans plus tard). Il n’y avait pas beaucoup de monde pour parier sur une comédie horrifique à l’époque. Et pour des ados habitués déjà au genre, c’était pourtant un cadeau. Le genre avait été pas mal exploré, comme par exemple le «Gremlins» de Joe Dante. Et puis on ne pouvait déjà pas prendre tous les films d’horreur de série B trop au sérieux à l’époque. Le premier «Chucky», par exemple, date aussi de cette année 1988. Avec le peu connu Michael Keaton, Burton engage aussi Winona Ryder, quasi inconnue aussi. Catherine O’Hara n’est pas encore la mère de Macaulay Culkin dans les «Maman j’ai raté l’avion». Et Geena Davis en gentille mère de famille n’était pas encore allée faire un road-trip avec Susan Sarandon. Après l’initiation que fut pour moi la série animée, le premier visionnage du film fut un bonheur avec un coté très famille Disney au départ qui part complètement en vrille pour laisser libre cour à un Michael Keaton incroyable. Winona Ryder avait déjà le charisme d’une star malgré son look pseudo gothique de l’époque.
Rétrospectivement, je trouve pourtant quelques longueurs, un déséquilibre dans le déroulement pour un film qui se contentait de 1h32. J’ai du me repasser 20 fois la scène du repas sur le «Day-O» d’Harry Belafonte. Oui, j’ai le DVD, obligé ! Pourtant, le temps est passé et avait presque embelli un peu plus le film qui souffre maintenant du problème du vieillissement des trucages. Je les vois comme datés mais finalement ça fait un peu kitsch et ça lui va bien. D’autant que chez Burton, il y a souvent eu des hommages à ces trucages qu’il voyait dans sa jeunesse, que ça soit dans «Mars Attacks!» ou «Ed Wood». Dans le nouvel opus, point de cela mais il a gardé une sorte de patine pour faire le lien entre les films. Sauf que j’ai pris 26 ans de culture en plus et je ne vois plus les choses pareilles. Dans ce nouvel opus, Lydia (Winona Ryder) a grandi et est maman d’une ado un peu rebelle (Jenna Ortega) qui renie sa mère et ses pouvoirs paranormaux. Deliah (Catherine O’Hara) est toujours là mais s’est réconciliée avec Lydia, qui reste hantée par Beetlejuice. Je ne vais pas trop en dire quand même pour laisser les surprises qui abondent dans ce scénario. On y rajoute l’ex-femme de Beetlejuice (Monica Belluci) pour pimenter le tout. Tim Burton aime décidément faire tourner ses compagnes…
Le «Fan Service» est évidemment très présent dans le second film mais pas seulement pour la licence Beetlejuice. Il y a de nombreuses allusions à toute l’œuvre du réalisateur pour les connaisseurs. Il y a également des hommage à des licences du genre horrifique, à d’autres réalisateurs et à la carrière de Burton. C’est un petit jeu que j’adore déjà dans les films parodiques et qui me ravit encore ici. L’humour n’est pas exempt d’auto-dérision ou de satire. Le clin d’œil aux influenceurs sera diversement perçu, par exemple. Comme Tim Burton doit composer avec une génération qui n’a pas vu son premier film, il prend garde de bien installer son histoire, ce qui rajoute un peu de métrage au début. Mais c’est un véritable feu d’artifice qui s’installe avant un grand final. Il n’a vraiment rien perdu de son art. Il est aussi bien servi par un casting renforcé par Willem Dafoe (qui n’avait jamais tourné avec Burton malgré sa filmo très fournie mais qui aurait pu faire un très beau Harvey Dent vu son maquillage) mais qui va aussi rechercher Dany De Vito en faisant fi de ses scandales sexuels. Alors bien sûr je suis fan donc je tolère sans doute un peu plus que la moyenne. Mais c’est un véritable bonheur de regarder ce film, d’être encore surpris par ces décors riches, ces lumières, ces couleurs, cette inventivité de chaque plan. Keaton est toujours au diapason de son réalisateur et ça fait plaisir de retrouver Winona Ryder en haut de l’affiche. Cela apportera immanquablement un nouveau public, même si les goûts ont évolué.
On peut enchaîner ou pas les deux films, dans un sens comme dans l’autre mais ça reste diablement efficace. Après, les adeptes de choses bien terre à terre détesteront les deux films et ça ne fait pas vraiment peur, même si j’ai entendu une dame dans la salle avoir quelques frayeurs ou du dégoût. Mais je me dis quand même qu’on peut s’arrêter là et n’en demande pas un troisième.