BD - Wake up America ! de John Lewis, Andrew Aydin et Nate Powell (2014)

On parle souvent de Marthin Luther King ou Malcom X mais on oublie aussi le “Big Six”, ces autres leaders du mouvement des droits civiques dont John Lewis fut un des derniers membres vivants (décédé en 2020). Il laisse son histoire en héritage dans “March”, traduit en français dans trois “Wake Up America”.

Autant vous dire que c’est un indispensable. Réunis aussi en un seul tome, ces trois ouvrages furent primés du prestigieux prix Eisner. Le premier couvre l’enfance de John Lewis jusqu’en 1960 puis on passe de 1960 à 1963 et enfin de 1963 à 1965. Un nouvel ouvrage sorti en 2022 fait suite à ces trois tomes, c’est “Get Up America”, car la lutte n’est pas terminée.

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Et quelle lutte ! Fils d’une famille de métayers, le jeune John Lewis trouve vite refuge dans les études. Il habite le sud des États-unis et poursuivre des études pour un noir, c’est plus que compliqué. Déjà que les écoles noires n’ont que des livres d’occasion et de vieux bus pour le transport. Si la ségrégation existe dès l’enfance, elle devient plus terrible encore dans la vie de tous les jours, des toilettes aux comptoirs des restaurants ou dans les cinémas. En grandissant, John entend parler d’un pasteur, un certain Dr Martin Luther King. Et lorsqu’il parvient avec obstination à trouver une université qui l’accepte, il se rapproche de ce mouvement “des droits civiques” dans la mouvance non-violente, inspirée par Gandhi. Mais s’il reste non violent, il subit les attaques, les coups et est emprisonné pour ses actions de protestation. Il voit surtout ses camarades de lutte assassinés, que cela soit par des lynchages de foule, des tirs de snipers, ou des cocktails molotov.

Tout cela se passait dans les années 60 dans le “pays de la liberté”, les USA. Si c’est indispensable, c’est justement qu’au delà de l’aspect autobiographique, il y a à la fois l’aspect historique, très précis, mais aussi l’aspect militant. On y découvre les différents groupes, leurs idéologies. On y découvre les différentes formes de militantisme, les luttes internes, les départs et les arrivées. Bref, la vie d’un mouvement politique. Tout cela est fait sous la forme de flashback, John Lewis accueillant de nos jours des visiteurs dans son bureau du congrès, au moment de l’investiture de Barack Obama. C’est passionnant, même si c’est parfois complexe dans les successions de sigles et de personnages. John Lewis s’attache à citer tous ses compagnons de route…Un point commun avec la biographie d’Obama, tiens.

Pour la forme, Nate Powell a choisi un noir et blanc très marqué, comme si c’était symbolique. C’est puissant tout en restant lisible et esthétique. La mise en scène, les points de vue sont très variés avec un bon sens du mouvement, notamment dans les scènes d’action, ou plutôt d’agression. Et encore, il n’y a pas de violence superflue, pas trop de sang ou de cadavre, comme en rapport avec la non-violence de Lewis. Les scènes de violence de foule, de lynchage sont terriblement marquantes et glaçantes. Et on se prend à revoir les images récentes de l’ère Trump, cette voiture qui roula sur des manifestants … S’il y a eu des avancées, rien n’est jamais acquis. On le voit encore aujourd’hui pour l’IVG.

Et c’est là que Get Up America donne une suite à ces ouvrages. Après le réveil, il faut se lever à nouveau. Et pas que l’Amérique, semble-t-il. Il n’y a pour l’instant qu’un Tome qui traite de la suite, soit à partir de 1965. C’est un peu la traversée du désert pour John Lewis qui se voit viré du mouvement SNCC, qui voit la non-violence disparaître au profit du mouvement des Black Panthers, etc…C’est particulièrement politique car on voit comment les différentes orientations cohabitent, luttent mais aussi l’influence de la guerre du Vietnam dans ce mouvement des droits civiques. J’ai trouvé que le dessin était aussi plus mou, ce qui commençait aussi dans le dernier Wake up, avec plus de nuances de gris. Il y a aussi moins de flashback et plus de notes biographiques. Un complément parfaitement utile dont on attend la suite avec impatience, sachant que John Lewis est décédé en 2020. Assisté de Andrew Aydin, il a du laissé de nombreuses notes.

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Ecrit le : 04/10/2022
Categorie : bd
Tags : autobiographie,histoire,USA,racisme,2010s,1960s

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