BD - Le Monde sans fin de Jancovici et Blain (2021)

Voilà un ouvrage à la fois distrayant et enrichissant abordant l’environnement, le réchauffement climatique et les mesures que l’on pourrait prendre pour éviter le pire, la “Fin du monde”. Enfin la fin de notre monde humain. Mais voilà, comme c’est Jean-Marc Jancovici, je m’attendais à être en conflit sur un point.

J’aime bien ce que fait Jancovici, ingénieur polytechnicien, pour vulgariser ce sujet complexe de l’écologie, l’environnement à travers Carbone4 et autres. Mais il y a un point où je tique plus, c’est son prosélytisme sur le nucléaire. J’entends bien ses arguments mais il en oublie bien d’autres. Car il y a d’un coté la science, les faits mais aussi les réalités du terrain concernant l’exploitation qui sont des faits moins connus. Aussi en ouvrant cet ouvrage de vulgarisation scientifique, je m’attendais beaucoup à un contenu très intéressant sur le pourquoi, sur la surconsommation etc…mais aussi à être contre une autre partie qui vise à glorifier un peu trop cette énergie. J’ai prévu un jour d’expliquer ma position sur le sujet. En voici donc une esquisse.

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Mais d’abord, il faut parler du début. Blain décide de rencontrer Jancovici et les voilà partis sur ce projet. C’est en mettant le lecteur à la place de lui même que Blain met en image les cours magistraux de Jancovici. On revient donc sur les différentes sources d’énergie, l’histoire de l’humanité, le tournant de l’utilisation du pétrole (mais aussi du charbon…) qui aboutit à cette accélération des phénomènes de pollution, effet de serre, réchauffement…mais aussi de surpopulation, de commerce mondial et de tout ce “sur-confort” dont nous bénéficions et abusons telle une drogue. Je dis ça et j’en suis l’exemple même en utilisant Internet sur un PC pour partager cela sur un blog. Est-ce nécessaire ? Bref, on parle du problème fondamental de la croissance infinie dans un monde fini et de la vision macro-économique dont il faudrait sortir pour tenter de résoudre ce problème qui nous fait courir à notre perte…

Le propos est passionnant, avec des exemples très parlants pour tout le monde, des chiffres, des comparaisons. Je connais déjà bien le site de Jancovici pour ça mais sous cette forme c’est encore plus facile d’accès. Seulement voilà, à un moment, ça dérape un peu quand on va aborder les choix énergétiques, même s’il tente de nuancer le propos. Le coup des 4000 morts officiels à Tchernobyl, ça ne passe que moyennement. L’oubli des victimes sur le long terme, notamment dans le vivant autour, pour Fukushima, ça marche moyen, bien que la sélection naturelle se charge de faire le tri. On nous dit comme d’habitude que le modèle des centrales nucléaires françaises est formidable en terme de sécurité…que faire trop confiance à la science pour sortir de l’ornière c’est mal. Paradoxe de Jancovici qui oublie tous les facteurs humains qui se glissent dans les équations. Il y en avait un très gros sur Tchernobyl. La Nature a fait le reste sur Fukushima. J’en connais aussi qui sont un peu oubliés sur le modèle français. Il le dit trop rapidement, mais l’aspect pilotable du nucléaire qui le fait fonctionner en mode alternatif et qui fait que l’on tente de réduire le coût d’exploitation est fondamental dans le risque. Mais c’est vrai que le volume des déchets reste faible, enveloppe de protection comprise. L’aspect stockage de l’énergie électrique aussi et on peut aussi regarder des hypothèses sur l’usage des batteries en tampon, leur recyclage, etc… Cela n’élude pas le problème principal de la surconsommation humaine.

L’avantage de ce livre, c’est de mettre des éléments sur la table pour que chacun puisse se rendre compte. Il faudrait pouvoir élargir plus largement encore le débat sur ces éléments comme l’usure, l’aspect psychologique, la notion de demi-vie, les niveaux de radioactivité et les conséquences sur la nature, les méfaits de la libéralisation du marché de l’énergie sur la sécurité, etc…Il en parle mais sans peser assez les conséquences sur le terrain de tout cela. Tous les incidents ne sont pas enregistrés, hélas et j’en sais quelque chose, tout comme les conséquences en Russie et Ukraine furent souvent mises sous le tapis pour minimiser les chiffres. Moi, élevé dans le culte du nucléaire, j’ai révisé mon opinion sur le sujet en découvrant des réalités. Je ne suis pas pour une suppression pure et simple mais il faut surtout se rendre compte qu’on doit choisir entre continuer comme ça et sacrifier les paysages pour mettre des centrales de toutes sortes, des éoliennes, etc…ou ralentir et sacrifier un peu de confort. Il ne faudrait donc pas réduire cet excellent ouvrage à ce débat sur le nucléaire car c’est tout le reste qui permet de se forger une opinion et d’agir ou faire agir. Si une solution unique existait, ça se saurait et c’est bien de rappeler que les décisions individuelles pèsent si peu quand tout le développement humain et les politiques sont en cause. Christophe Blain met cela en image avec son humour habituel et son trait caractéristique, déjà apprécié dans “Quai d’Orsay”.

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Ecrit le : 21/09/2022
Categorie : bd, environnement
Tags : environnement,bd,écologie,2020s,

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