Législatives 2022 - Bilan de campagne - Vol. 2

A la suite des trois articles sur mes débuts de militants, j’avais fait une pause parce que c’était de plus en plus intense. Les articles ont enfin changé de rythme aussi. Il est temps de faire un bilan avec un peu de recul. 2ème partie

Une campagne violente

La politique devient de plus en plus violente. Comme d’habitude il y a eu des agressions. Dans notre circonscription, c’est un colleur agressé par un “Zemmouriste”. On a eu Raquel Garrido agressée à la bombe lacrymo ce qui fit moins de battage que la bombe de chantilly sur le crane de Blanquer. Ca en dit long sur la presse. Il y a eu les pires insultes sur twitter du compte “les Séniors avec Macron”, de sinistre mémoire. Qui se ressemble s’assemble ? Ils furent suspendus. On retrouve bien une certaine droite patronale qui a quitté aussi les LR parce que le pouvoir les attire. Heureusement, pas tant d’agression que cela sur les tractages, tout de même. Des fachos qui voulaient faire leur loi, coté RN, Zemmour ou LREM. Oh, bien sûr, #LaPoliceTue (ce qui est un fait…quelles qu’en soient les causes) a provoqué quelques remous chez les tenants de l’ordre. Mais il y a eu aussi des abus de pouvoirs des maires pour permettre ou pas les tractages dans marchés ou en périphérie des fêtes. Les arrêtés n’étaient pas conformes à la loi, selon les jurisprudences existantes, la loi étant quand même trop floue sur ce cas précis. L’exercice démocratique pose problème au pouvoir, on le voit bien, puisque considérer que le vote présidentiel annulerait l’élection suivante est contraire à la constitution (séparation des pouvoirs). On a vu président comme ministres qualifier cette gauche unie d’extrême gauche anti-républicaine ce qui est une atteinte plus que dangereuse à la volonté de pluralité politique.

Cette violence verbale peut toucher, énerver. Mais il y aura d’autres choses qui viendront, comme les petites ou grandes trahisons par rapport aux promesses. Je m’y étais déjà préparé, ne serait-ce que sur le programme NUPES, je ne me faisais pas des illusions quant aux 650 mesures. Mais les accords électoraux et le profil de certains candidats PS, PC ou EELV pouvait aussi faire craindre quelques fuites. Pour Jadot, entre sa compagne et son passif, je n’avais aucune confiance dans cette branche d’ELLV. J’ai bien noté que Fabien Roussel avait trahi dès le lendemain mais qu’attendre d’un “fommuniste” comme lui qui brunit rapidement sans s’exposer au soleil. C’est aussi une évolution d’un électorat ouvrier dragué par l’extrême droite et que parfois des candidats de gauche et d’extrême gauche viennent séduire avec les mêmes arguments. La droite et le centre l’ont aussi fait depuis longtemps.

Clientélisme ?

Il y a une part de clientélisme dans les élections. Déjà, on va cibler selon les résultats des précédentes élections, histoire de conforter sa base électorale. Ainsi, à NUPES, c’étaient des quartiers dits “populaires”, soient des quartiers d’immeubles HLM où la part de population d’origine étrangère est plus importante avec même parfois une impression de ghetto…pas qu’une impression d’ailleurs dans certaines villes. Et on pouvait voir que les Macronistes étaient plus présents dans les quartiers de cadres et cadres supérieurs. Pour le PS et EELV, euh…joker mais l’amalgame NUPES a pu élargir le spectre. L’analyse du premier tour des législatives dans ma ville a montré que c’est le manque de remobilisation dans les quartiers populaires qui a manqué. Il y a eu un véritable espoir dans la présidentielle mais allez expliquer le fonctionnement de l’état avec l’assemblée nationale. Pour beaucoup, après la défaite de la présidentielle, ça ne servait plus à rien. Il fallait trouver des occasions d’argumenter personne par personne pour tenter d’inverser la tendance quand l’adversaire joue sur un électorat retraité et aisé qui ne veut rien voir changer. Et je ne parle pas de ceux qui votent contre leur classe, comme cet ouvrier dans l’usine automobile d’à coté qui votait Macron de peur que son patron trouve dans l’arrivée de Mélenchon une raison de fermer…Les raisons, ils les trouvent toujours pour fermer les usines, hélas !

Mais dans le discours que l’on tient, dans les tracts, on adapte évidemment sur les sujets qui feront mouche. Alors clientélisme ou réponse aux besoins ? On ne choisit pas ceux qui votent et parfois on bénéficie d’une côte d’amour dans certaines communautés qui n’est pas toujours rationnelle. La figure nationale aide aussi, et pas seulement la personnalité locale. Dans mon cas, la personnalité locale, bien connue de ses anciens élèves, a aidé aussi. On masque aussi les mauvais cotés avec parfois l’impression de se mentir à soi même. Je n’étais absolument pas convaincu que notre candidate ferait avancer la cause animale, malgré les quelques éléments dans le programme. En en discutant vaguement avec elle, il y avait du boulot… Mais bon, était-ce si important face à tous les autres sujet urgents ? Il faut voir ensuite si des disciplines de parti peuvent fonctionner aussi, et pas seulement les convictions personnelles. En disant cela, je sais que je reprend exactement ce que je critiquais chez les députés macronistes. Je suis juste réaliste sur le fonctionnement du parlement, et pas seulement en France. J’ai hâte de voir ce que cela donnera dans l’organisation NUPES.

Victoire ou défaite ?

Et bien au premier tour, nous étions 2ème, localement. La mobilisation des bureaux favorables n’a pas eu lieu. J’avais le sentiment de ne pas en avoir assez fait mais même les camarades qui ont bien œuvré dans leur secteur n’ont pas eu le résultat de la présidentielle. Il fallait vraiment du nombre et de la disponibilité pour inverser la tendance. Pour notre groupe aussi jeune, ce n’était pas possible. On passe de 55 à 40 % des voix, par exemple sur une des villes les plus favorables avec une participation famélique. On a eu une baisse de près de 45 à 50% par rapport à la présidentielle, quand c’était 30% chez LREM et 60% au RN. Il faut se rendre à l’évidence, ça n’intéressait plus assez. J’y vois plus de la lassitude et des campagnes trop proches… à dessein. Le président Macron a tout fait pour ne pas faire campagne, pour ne pas intéresser les français sachant que son “cœur de cible”, les retraités aisés, ira toujours voter mécaniquement. Et puis au second tout, ce fut du 38/62 dans ma ville et au final un 45/55 dans la circonscription, historiquement très à droite depuis 30 ans. Résultat en demi teinte mais qui cache surtout l’amère désillusion de l’abstention trop forte dans “notre” électorat. Le sursaut de la présidentielle n’a pas suffit.

Alors, plutôt que de voir une défaite locale, j’y vois un début d’autre chose, un sursaut de la gauche qui doit faire envie pour les prochaines échéances. On sait aujourd’hui tout le cynisme et le machiavélisme dont peut faire preuve Macron pour s’accrocher au pouvoir, sans doute bien plus que d’autres avant lui, à l’image des autocrates en vogue actuellement en Europe (Orban, Erdogan, Poutine…non, je n’exagère pas). L’utilisation de la police dans sa manifestation la plus droitière (Syndicat Alliance, Préfet Lallement et son équipe..) n’est qu’une illustration. Les mensonges sur le “barrage républicain” et toutes les formules creuses en sont une autre. L’entrée d’anciens de la Manif pour tous au gouvernement finit de basculer encore plus vers la droite rance. On voit aujourd’hui qu’il préfère l’extrême droite à l’union de la gauche pour garder le pouvoir. On voit toutes les trahisons de ce camps autrefois centriste et qui montre son arrivisme et cela sans aucune idéologie sur laquelle s’accrocher sinon argent et pouvoir. Il y a, à nouveau, ce sentiment inquiétant d’être dans une situation explosive comme dans les années 30. Une partie du peuple dort peut-être ou le fait croire mais la colère peut l’emporter sur le découragement. Ailleurs, elle s’exprima dans l’extrême droite, si choyée par les médias, les même qui nous vouaient aux gémonies.

Le Pouvoir

Dans la culture politique, il y a la conquête du pouvoir puis sa conservation. Il y a des partis sans ambition de pouvoir aussi et on peut considérer que RN ou Reconquête en sont, comme le NPA ou LO le sont à gauche, ou bien encore le Parti Animaliste. Pour le RN, c’est plus le jeu de Macron de taper sur la gauche sans faire campagne contre l’extrême droite qui a donné 89 députés que la campagne du RN, bien timide. Presque comme Macron et ses candidats en 2017, ils ont été élus par défaut. Et puis il y a le reste des partis qui développent normalement de vraies propositions pour gouverner. Aujourd’hui, nous ne sommes plus dans une concurrence entre propositions comme avant. Ce fut la tentative de la NUPES mais on voit que d’un coté LR/UMP n’a plus rien à proposer de neuf et n’arrive plus à faire entendre la moindre originalité sans se la faire repiquer par LREM. Et LREM n’a aucun autre proposition cohérente, prenant de l’un ou de l’autre par opportunisme mais défaisant dès le lendemain sa promesse ou la noyant dans une commission ou une mission “flash”. Si bien que l’on dégoutte totalement de la politique ceux qui auraient pu croire en quelque chose.

Le pouvoir, cela dit, est une drogue. Une fois arrivé dans un quelconque pouvoir, on veut le conserver et on est prêt à tout, à commencer par quelques mensonges ou arrangements avec la vérité. On promet effectivement à Paul ou Pierrette ce qu’ils veulent entendre. Aussi, pour le parti ou le groupement que je soutenais, on promettais salaire de base, retraite plus tôt, mieux rémunérée, point d’indice, etc…Au fond, est-ce que je croyais à tout ? Non, il y aurait eu des déceptions, des compromis, ne serait-ce que dans les priorités ou sinon des retours en arrière. Surtout que je ne voyais pas une majorité facile à manier en cas de victoire. Mais bon, c’est le jeu de faire rêver plutôt que de dire que le réchauffement climatique va nous faire mal, qu’il va falloir trouver de l’argent quelque part, surtout chez les plus aisés, etc… N’ayant eu qu’un microscopique pouvoir dans le petit groupe insoumis, je ne peux pas dire que j’ai ressenti cette ivresse. Pas même celle de galvaniser une foule. Mais je pense que certains en rêvent quand la majorité des militants s’en méfie. Et puis il y a parmi tout ça des professionnels de la politique ou de futurs pro, ceux qui ont le cursus, qui savent naviguer en eaux troubles pour trouver toujours un poste même en cas de défaite. On l’a vu bien vite chez LREM, comme auparavant chez LR et PS. Et ainsi de suite…

Et après, on fait quoi?

Après, j’avais dit que j’arrêtais. J’arrête donc et je ne me vois pas rempiler de la même manière pour les départementales ou les municipales. Pour des insoumis peut-être, mais plus mené par le PS ou EELV. Ils sont restés vraiment trop dans le passé , dans de vieilles idées, ou dans une vision hégémonique localement… Ils n’ont pas tardé à essayé de verrouiller le truc dans la circo à leur profit, comme je m’y attendais mais on ne nous la fait pas à l’envers. Je peux me dire que la NUPES les fera évoluer mais il y a ce manque de sang neuf pour l’instant (même au niveau insoumis de ma ville). On me dira que je casse la NUPES ? Je répondrais qu’il faut revenir au rapport de force initiale de la NUPES, celui issue du 1er tour des présidentielles et qui représentait une réalité rencontrée sur le terrain, un vrai changement de valeurs aussi. Une réalité qui n’est hélas pas transformée dans le militantisme aujourd’hui. Ils sont où ces jeunes que l’on a vu manifester sur des causes ? Ils ne sont pas dans des partis ni même dans des mouvements et c’est clairement ce qu’il a manqué. Il faut comprendre que l’associatif c’est bien mais qu’à un moment il faut aussi en passer par le politique et qu’il y a des passerelles. Je relisais récemment sur les droits civiques ou sur le droit de vote des femmes, les fameuses suffragettes, et comme toujours c’est les manifestations, la radicalité et la négociation politique qui amenèrent le changement. Les trois de concert même si parfois cela s’oppose ! Alors je me pose évidemment la question de ce qu’il manque pour mobiliser sur des élections intermédiaires ce qui fut réalisé lors de la présidentielle. Doit-on renforcer la connaissance des institutions ? Travailler sur le civisme ? Sans doute mais comment ? Comment surtout réussir à donner confiance quand le pouvoir actuel fait tout pour dégoutter les gens de toute la politique dans son ensemble. Hollande avait été très performant pour tuer la gauche, Macron fait plus fort encore, il tue la politique encore plus vite que son lent suicide. L’élève dépasse le maître. Mais maintenant, le ver est dans le fruit et il n’y a pas beaucoup de monde à gauche pour aller au combat. Mais si…les Insoumis. Alors, faites mieux !


Ecrit le : 10/07/2022
Categorie : reflexion
Tags : réflexion,politique,france,législatives

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