Législatives 2022 - Bilan de campagne - Vol. 1

A la suite des trois articles sur mes débuts de militants, j’avais fait une pause parce que c’était de plus en plus intense, mais aussi pour préserver une certaine confidentialité. Les articles ont aussi changé de rythme aussi. Il est temps de faire un bilan avec un peu de recul.

J’avais prévu de m’engager le temps de cette campagne et après d’arrêter. J’y ai laissé de l’énergie, surtout que ça tombait plutôt mal professionnellement. Je me souviens qu’il y a quelques années dans l’ancien blog, on m’avait demandé quand je ferai de la politique. Bon, voilà, c’est fait mais je n’ai pas eu et n’aurai jamais d’ambition personnelle dans ce milieu, de toute façon. L’égo est trop souvent au centre (et déjà qu’il est aussi dans un blog, d’une certaine manière, même en pseudonymat…). Certains ne comprendront pas, penseront cela inutile. Qu’importe, “On l’a fait !”

Le relationnel entre partis et militants

Comme je l’avais dit, j’ai (nous, car c’est aussi madame qui est à l’origine de cela) été un peu “forcé” de créer un groupe d’action sur ma/mes communes, faute d’autre volontaire. Cela a permis de faire ressortir quelques autres militants qui attendaient aussi un groupe, dont des vétérans d’autres campagnes passées. Parmi tous ces “inscrits” pour faire des actions, la fameuse règle des 50% dans le militantisme s’est appliqué : 50% de ceux qui se disent prêts à s’investir, le font vraiment. Donc après une rapide progression, on arrive à un plafond mais la motivation était là, puisque jeunes dans le domaine (mais pas dans les veines). “Pas de chance”, nous avons eu une candidate d’un autre parti que les Insoumis et idem pour le suppléant. Et comme c’était le PS, ça m’a permis de comprendre beaucoup de choses (j’y reviens ensuite). Si j’ai (pas que moi tout seul, oh!) été moteur pour proposer des actions dans le cadre de l’union populaire, j’ai du provoquer les choses pour réunir les autres partis rapidement et ainsi fédérer autour d’une candidate trop attentiste, encore dans le passé, la nostalgie du grand PS. Rien que la désignation a pris beaucoup trop de temps en interne de ce parti, du fait qu’une femme devait être désignée pour cette circonscription et que le candidat “naturel” du PS semblait un homme. Pour les autres partis, EELV était présent mais transparent sur le terrain. Le PCF était actif mais ne proposait rien, sinon critiquer le passé (certes peu reluisant pour les Insoumis de la région proche). On a pris, au début, souvent plus de temps à se parler du passé qu’à être dans l’action véritable. L’accord national a fait des déçus, c’est sûr. J’avais l’impression d’être au boulot… Mais sinon l’ambiance n’était pas mauvaise…quoique. Juste que le PS aime décider mais pas proposer, à moins d’être au pied du mur. Et on comprend, alors, l’état du parti.

Mon rôle et celui du groupe insoumis/union populaire, a plus été de faciliter les actions et le lien local entre les groupes avant qu’un certain équilibre se trouve. Avec des moyennes au dessus de 20% des votes au premier tour de la présidentielle et parfois à plus de 55%, les Insoumis représentaient quelque chose…et pourtant ce fut 20% sans rien faire dans ma ville. Combien pouvait-on espérer aux législatives ? Mystère. Mais juste après avoir mis de l’énergie pour que ça démarre, j’ai laissé un peu se tasser les choses pour voir ce qu’il en ressortait. D’abord rien…Les paroles mais pas les actes. Aucune proposition, et même les participations prévues n’ont pas été concrétisées. Et puis soudain, ça a bougé, quand “la cheffe” a parlé. Enfin il faut voir parce que finalement, faute de troupes, elle a collé elle-même ses affiches locales dans la première tournée. Et puis ça s’est réveillé sur les deux dernières semaines. Ainsi va le PS et la politique locale. Mais La condescendance par rapport à l’expérience de campagnes passées, ça va 5 minutes mais ça fait l’inverse de ce qu’il faut. L’émulation et l’enthousiasme ne sont pas là quand une candidate ne se voit pas gagner, trop habituée à perdre, sans doute ! La campagne de trop ? La confiance est revenue lorsque les indicateurs sont passés au vert et les choses se sont mises en place….je ne parle évidemment qu’au niveau local avant le 19 juin, la suite étant une autre histoire.

Les militants

Des militants, j’en ai vu dans notre groupe, et aussi ceux des autres partis de cette union. Pour eux, ça ressemblait plus souvent au club du 3ème age (mais des retraités actifs !), à l’exception d’un jeune, encore étudiant qui a la fibre politique. Pas macroniste, pas complètement PS, pas loin d’être insoumis, le temps fera son œuvre dans un sens ou dans l’autre. Pour les groupes insoumis, majorité de 40-50 ans, quelques jeunes de 20-30 ans et des militants plus âgés qui étaient souvent syndicalistes. Beaucoup de gens de l’enseignement et un profil plutôt cultivé, notamment sur l’histoire et sur la politique. Pourtant, comme partout, il y a des exceptions, des “brebis galeuses”, comme on dit hélas pour les ovins. Pour moi, il n’y en a eu qu’une qui était virulente, soupe-au-lait, mais surtout flirtant avec le complotisme, l’homophobie et vraiment pas ouverte au véganisme. Oh, j’en ai vu d’autre, c’était pas méchant, et on a su trouver les bons réglages. Cela dit, j’ai vu que le sujet COVID n’était vraiment pas à aborder car ça peut partir dans le n’importe quoi. J’ai assez de collègues dans le délire du complot sino-franc-maçonnique pour éviter cela. L’essentiel, c’est de garder l’objectif en tête, le reste attendra…ou pas. J’ai déjà parlé aussi de la laïcité comme sujet tendu en France. Globalement, ceux que j’ai rencontrés sont alignés sur l’esprit de 1905, POINT. Il doit quand même y avoir quelques racismes par ci, par là, quand on creuse. J’ai fait un petit rappel des “valeurs” par mail, côté Insoumis, en soulignant quelques points. Aucune réponse mais tout le monde était à son poste.

Cela m’a confronté à mon propre profil de militant. J’ai dit par le passé que je n’avais pas une passion pour Mélenchon (dans le sens littéral, ce qui ne veut pas dire que j’y préférai un autre ou que je ne l’aimais pas), que je n’étais pas à 100% pour toutes les mesures de l’Avenir en commun mais que c’était quand même largement ce qui allait le plus dans mon sens politique. En discutant, j’ai aussi retrouvé ce même avis chez d’autres Insoumis. Mais tout le monde reconnaît les qualités hors du commun du leader insoumis pour galvaniser, emmener une campagne. Pour l’avoir vu cette fois en vrai par 2 fois, c’est quelque chose ! Chacun vient finalement avec ses sujets de prédilections, souvent très pointus selon ses affinités. Mais face à cela, il y a des électeurs qui ont leurs besoins, leurs attentes et ça ne colle pas toujours. On apprend à discuter de cela mais a-t-on la maîtrise de tout un programme aussi conséquent ? Non. Dans un milieu professionnel, je saurais réorienter vers le ou la spécialiste d’un sujet mais là, on se retrouve seul, ou à 2 ou 3. Je ne connaissais pas toutes les spécialités de chacun. Notre candidate elle-même n’abordait pas des sujets que j’aurais aimés entendre, en préférant d’autres plus maîtrisés. Il y en a qui ont le talent pour faire croire qu’ils maîtrisent tout, masquant habilement leurs failles. C’est un métier que je n’aime pas faire. Je fus une petite main parmi d’autres qui a apporté quelques qualités comme les autres, sans plus.

Structure de parti ou de mouvement ?

Les partis ont une structure plutôt pyramidale et hiérarchique. C’était bien quand il y avait beaucoup de mondes et de militants. On prend sa carte, on participe à des réunions, des actions dans des cellules locales, départementales, régionales, etc…Sauf qu’au fur et à mesure des défections et du vieillissement des membres, les différentes strates de la structure se vident et ça ne communique plus ou ne fonctionne plus.

A l’opposé, la structure d’un mouvement comme les insoumis est plus libre. Pas de carte, on vient comme on veut et on crée un groupe avec quelques règles de fonctionnement communes. Il manque juste des liens entre les différents groupes qui se font ou pas selon la volonté des autres groupes. J’avais pris le parti de contacter ceux autour de moi mais je n’étais pas obligé. On m’a présenté à d’autres mais l’inverse ne fut pas toujours vrai. J’ai vite fait le tri entre ceux qui se la jouent perso ou ceux qui se la jouent collectif, c’est très majoritairement le second cas. Pour les raisons de ça, je m’en fiche. J’ai peu à peu laissé de l’autonomie aux membres du groupe en étant plus facilitateur des actions. Surtout qu’on a été amené à couvrir 3 communes. N’ayant aucune ambition politique moi même, comme beaucoup d’Insoumis, je comprends aussi ces différences d’approche. Et puis il y a les décisions du siège qui viennent par dessus ça, sans que cela soit très lisible de la base.

Que faut-il alors pour gagner ? Et bien ça dépend beaucoup de la taille et de la jeunesse du truc. On a pu le voir avec LREM qui était un mouvement et qui a repris la recette du parti une fois installé, sans arriver vraiment à transformer l’essai. Le plus dur c’est de durer et d’avoir une “figure fédératrice” pour cela. LREM a son chef. Les Insoumis aussi mais que dire du PS, des LR etc…Plus personne qui donne envie chez eux. Donc plus de sang neuf, et des partis qui disparaissent comme les générations de militants. On vote plus par habitude selon l’étiquette, pour encore trop d’électeurs, sans même lire le détail ou s’intéresser à la personne.

Dans le cas des Insoumis, dans la dynamique qu’il y avait, il était surprenant de voir du monde aux réunions publiques, pourtant faites à l’arrache. Les meetings parisiens étaient débordés et les salles trop petites. Même en extérieur, c’était trop de monde. Après, la dynamique c’est bien comme indicateur mais pas une science exacte pour le résultat. La figure clivante de Mélenchon apportait ou repoussait des gens. Il y a aussi d’autres figures montantes ou déjà un peu installées (Ruffin, Autain, Quatenens, Panot, Obono, …) qui donnent envie à certains. Tant mieux. Et d’autres arrivent indiscutablement avec cette élection. Donner envie à tous de participer, c’est la clé…Mais il reste à donner envie à tous de voter aussi et là, ça coince.

Les outils numériques

J’ai du me remettre à utiliser plusieurs outils. Déjà le site de l’action populaire pour créer des événements etc … Et c’est plutôt bien fait. Juste qu’il y a trop de notification pour tout et que ça tue le truc ou que l’agenda est vite illisible. Je suis revenu rapidement au mail pour certains militants plus familiers avec cet outil et j’ai utilisé Telegram pour d’autres. Le PS m’a forcé à remettre Whatsapp le temps de la campagne. Franchement, aucun intérêt par rapport à des produits plus “sécurisés”. Des habitudes et du panurgisme. Je l’ai viré un temps, même si ça a froissé le PS, remis pour la conclusion. Bon, il y a la version desktop/web pour contourner. J’avais aussi Signal au cas où que j’ai supprimé aussi. Tout ça disparaîtra de mon téléphone de toute façon. Il y a besoin d’un système de messagerie pour les groupes et je reprocherai ça à Action populaire, même si c’est compliqué, de ne pas faire un système simple et intégré au groupe, et mobile-friendly (l’appli, bof). Cela dit, l’autre problème est de ne pas se faire “infiltrer” le groupe. J’ai eu des doutes avec certains membres jamais vus et que j’ai googlé. La candidate a été marquée à la culotte par des militants LREM et ce n’est pas la première fois. La gestion de la confidentialité des actions serait à voir.

Finalement le compte Twitter créé va rester vivant …façon de parler, j’ai programmé la disparition des tweets de campagne. Et le vieux Wordpress politique a repris du service en alternatif, comme depuis 11 ans déjà. Il est depuis retombé dans l’oubli. Les réseaux sociaux ont-ils été vraiment utiles ? C’est une lutte violente sur Twitter et ça a pu jouer dans certaines polémiques. Ça ne change pourtant pas l’issue de la campagne car ce sont plutôt les trois groupes qui se partagent la vie politique que l’on retrouve : LREM et ses robots ou profils zombies, Reconquête plus que le RN pour l’extrême droite et les Insoumis avec quelques renforts de PS déçus des années Hollande (et anciens camarades blogueurs qui ont survécu aux années Hollande). Mais globalement, j’ai connu plus violent à une époque. Chacun campe un peu sur ses positions, très caricaturales chez les autres partis avec de l’anti-bolchévique primaire ou de l’anti écolo-taliban. A ignorer.

Organisation

Pour le planning des événements, ce fut compliqué aussi puisque avec plusieurs groupes, des pôles sur 5 ou 6 villes, divers outils, on part dans un joyeux bordel. Les Insoumis du coin avaient l’habitude de Framadate pour ça. Désolé mais c’est quand même inutilisable sur mobile ce truc car ça défile mal, c’est peu lisible ou ça ralentit. Même en Desktop, ça reste limité. Framasoft se repose sur ses lauriers. J’en suis venu à me dire qu’un peu de structure aurait été bienvenue. Avec deux personnes pour diriger la campagne, ça aurait du permettre de la fluidité. Il faut distinguer le planning de la ou du candidat(e) et celui des actions militantes. Ils peuvent se croiser pour justement bien impliquer les groupes. Avec un(e) animateur/trice par pôle, relié à la direction de campagne, ça aurait pu mieux marcher alors que là, il y avait trop de strates : des groupes insoumis telegram circo, un groupe insoumis telegram ville, des groupes whatsapp PS ville dans tous les sens, un groupe whatsapp PS circo, un autre ancien groupe Whatsapp de gauche, un framadate, des mails, des sms, un facebook, trois ou quatre twitters… Pas grand monde pour vraiment tirer et animer le truc. Et tout le monde va dans tout sans finalement rien faire ou savoir où mettre quoi. Ca s’est un peu amélioré lors de la dernière semaine, avec le dynamisme de la directrice PS pour faire le lien Mais ça se décidait encore par ailleurs sans comprendre comment. On ajoute à ça un site bricolé je ne sais comment et sans le moindre flux RSS, pas lisible en mobile. Bref, on se dit qu’on doit maintenant avoir quelqu’un qui gère tout ça correctement et ce n’était pas le cas. La structure d’un parti ou mouvement doit aussi s’adapter à ces pratiques et ce qui était valable avec les Insoumis n’a pas eu le temps ou la volonté d’évoluer dans la NUPES locale. A méditer.

On peut pourtant se dire que ce n’était pas forcément mieux ailleurs. La concurrente LREM, pourtant ex-ministre invisible, avait un site quasi introuvable et peu à jour. La plupart de ceux que j’ai vu étaient juste pour la présence web et un peu moins bricolé d’aspect pour ceux qui faisaient du clé en main “parti”. L’autre candidat de droite a aussi cessé de mettre à jour son site pendant 4 semaines. Les twitters n’étaient pas vraiment alimentés sinon par les insoumis de service. On a finalement eu quelques visuels sympa créés en commun pour twitter mais le jeune votant n’est plus sur Twitter. TikTok c’est encore autre chose à maîtriser. Facebook, le truc pour les pré-retraités est toujours plus actif mais on est toujours plus dans l’égo (photos de campagne) que dans l’information utile ou militante. Pas vraiment ma vision des choses donc. Le fait d’avoir du faire une campagne si précipitamment après les présidentielles n’a rien aidé du tout. Et comme le président sortant a voulu des non-campagnes, la démocratie et la politique n’en sortent pas grandies. A se demander si peu à peu on ne glisse pas vers de l’autocratie…A moins d’une 6ème république ;-)

A suivre la semaine prochaine.


Ecrit le : 03/07/2022
Categorie : reflexion
Tags : réflexion,politique,france,législatives

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