Cinéma - Coupez! de Michel Hazanavicius (2022)
Amis de la déprime et du film d’auteur, passez votre chemin. Si auteur il y a bien, c’est un film à tiroir que nous propose Michel Hazanavicius dans une enveloppe de comédie gore délirante.
J’en vois faire la fine bouche en entendant gore, ayant peur de voir des trucs bien dégouttant à l’écran et de recevoir des gerbes d’hémoglobine. Pas loin quand même avec ce film de zombies (oui on cumule) mais tout cela se fait dans la bonne humeur et l’autodérision. En réalité, c’est un film sur le cinéma, un peu une constante si on se souvient que “The Artist” était un hommage pas toujours adroit au passé. Pour les fans du monsieur, on est aussi proche des OSS117 pour l’humour décalé. Mais Hazanavicius aime aborder tous les genres, surprenant à chacun de ses films.
Dans un grand bâtiment désaffecté, un zombie s’en prend à une jeune femme craintive. En réalité il s’agit du tournage d’un film de série Z, interrompu par un réalisateur autoritaire. Lors d’une pause, de véritables zombies apparaissent : ils sont le résultat d’une ancienne malédiction que le réalisateur a réveillée afin d’obtenir de ses acteurs l’émotion qu’il recherche. Tous sont finalement contaminés, à l’exception de la jeune femme, seule survivante.
Ca c’est le résumé de la première partie du film…Puisqu’il s’agit d’un film sur un tournage d’un film qui montre un film qui dégénère (si c’est pas de la mise en abîme, ça !). La suite est sur la préparation du film et une sorte de making-of. Si la première partie provoque déjà des fous rires, tant il y a à la fois de l’horreur des plus délirante et caricatural, la suite est aussi pleine de surprises. On assiste à la préparation de ce film tordu d’un réalisateur “moyen mais pas cher”, presque un Ed Wood en puissance. Et tout ça avec un super casting en plus, emmené par Romain Duris et Bérénice Bejo qu’il vaut mieux tenir éloignée d’une hache. L’affiche est réussie pour résumer ça. Mais le paroxysme du film est de revoir le tournage complet qui explique tous les “défauts” de la première partie, les incohérences du scénario, etc. Le tournage est un live-streaming, sorte de critique des dérives du cinéma.
Il faut rajouter, comme me l’a rappeler mon collègue [Lord], que c’est l’adaptation d’un film japonais, One Cut of the Dead. On y retrouve d’ailleurs une actrice en commun, la terrible productrice. Il y a sans doute un humour un peu différent mais la trame général, le déroulé, sont identiques. Certains personnages ont été un peu étoffés. Et puis il y a le truc des noms des personnages dans le film français, des noms japonais et ça, c’est tellement décalé, comme une petite pique aux producteurs qui imposent tout et n’importe quoi.
Car le véritable sujet, c’est le cinéma, cet art qui crée du rêve souvent à partir de bricolages, de hasards aussi. L’allégorie finale résume bien ce qu’est un film avec un réalisateur qui porte certes son film mais qui ne peut rien faire sans une équipe qui a ses égos, des catastrophes ambulantes, des copinages,… Si on est prêt à accepter ce joyeux délire, on sort de là avec un sourire jusqu’aux oreilles, des moments cultes, et un peu de vomi mélangé au faux sang qui a giclé abondamment sans choquer véritablement. Car depuis le début, on sait que tout ça est “pour de faux”, comme de grands enfants que nous sommes. Cela s’adresse aussi au cinéphile avec des allusions à Romero, forcément pour les Zombies et ce qu’ils représentent. Un film familial quoi, hé hé !
Alors après, savoir s’il faut voir la version japonaise ou française, … C’est proche, plus concis pour la version japonaise, plus proche de nous pour la version française. Mais l’effet de surprise ne fonctionne qu’une fois.