Cinéma - Tout simplement noir de Jean-Pascal Zadi et John Wax (2020)
Le faux documentaire est devenu un sous genre de la comédie parodique…avec ses codes. Je me réjouissais de voir ce que cela pouvait donner dans le difficile exercice de la dénonciation du racisme.
Hasard du calendrier et pas volonté du distributeur, le film a bénéficié de l’éclairage du mouvement « Black Live Matters », d’un calendrier estival dégagé des blockbusters US, ce qui l’a mis certainement plus en lumière que ce que la production avait prévu. Tant mieux pour nous, spectateurs… rares spectateurs en cette période post-confinement.
Le sujet est donc un faux documentaire sur un acteur à la recherche de boulot…mais aussi d’un sens à sa vie. Jean-Pascal Zadi y joue son propre rôle dans une composition d’acteur raté. Il décide de monter une grande marche de la contestation noire et part en quête de célébrités pour l’aider à fédérer autour de cette idée. Mais c’était oublier le caractère gaffeur et loser de cet anti-héros. A la manière d’un Sasha Baron-Cohen, l’accord des participants en plus, il nous dépeint ainsi ce milieu du show-business et du militantisme et la place qu’y tiennent… les noirs.
Avec son mètre 93 et ses dents écartées (fallait pas attaquer le physique de qui tu sais…), notre acteur-réalisateur n’a pas le physique passe-partout mais sait parfaitement en jouer. Il a créé un personnage dont je ne saurais dire s’il est vraiment proche de lui-même. En tout cas, il à réussi à fédérer une chose : Une bande d’acteurs, d’actrices et autres célébrités pour participer à ce film. Il y a de bonnes surprises (Kareen Guiock), des confirmations (Fary dont c’est le premier film, Ahmed Sylla) et des valeurs sûres (Ramzy Bedia, Jonathan Cohen, Lucien Jean-Baptiste). Cela se déroule un peu comme un film à sketchs au gré des rencontres, ce qui rend parfois la mise en scène bancale. Heureusement, l’ensemble tiens avec notre Jean-Pascal Zadi qui a quelque chose de Mr Hulot avec sa grande silhouette maladroite.
Pour que cela tienne, il faut quand même quelques scènes cultes (la scène du restaurant par exemple…) et des dialogues qui frappent. Mais il faut surtout du fond et il faut reconnaître qu’il y en a. En effet, JP Zadi et son co-réalisateur/producteur/directeur artistique John Wax montrent différentes facettes de ce militantisme qui vise à ce qu’il n’y ait plus de différences entre les couleurs de peau. Mais rien que la scène où il faut définir « l’homme noir » vaut son moment de réflexion. Pourquoi « l’Homme », même avec un grand H. Quelle date choisir ? Quel message ? Et les blancs ? toutes ces questions complexes apparaissent dans ce film, ce qui est à la fois trop et pas assez. Sur ce problème simple, nous voyons justement que rien n’est simple. Il n’y a pas UN noir, comme il n’y a pas non plus UN homosexuel, UNE femme, etc…Et pourtant il y a une vision biaisée de la part de ceux qui ont le pouvoir, comme lorsque l’on parle de l’Afrique comme une entité unique alors que l’Europe n’en est toujours pas une.
Le film a donc plusieurs lectures, même si parfois les propos s’embrouillent. Il y a des moments de pure comédie où on rit volontiers. Il y a aussi des moments touchants car ce personnage de Jean-Pascal Zadi est touchant dans ses maladresses. Il y a des moments plus philosophiques qui vont au delà de la simple cause « noire » mais parlent de tous les militantismes. Ce n’est pas la comédie de l’année mais c’est largement au dessus de la moyenne de ce que nous avons eu récemment, surtout sur ce sujet.