Musique - Jean Ferrat – La Montagne (1965)

On a une certaine image du chanteur à travers ses « tubes » et puis il y a les albums, finalement peu nombreux. Je n’ai pas forcément choisi le meilleur ou le plus connu mais celui qui me touche.

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Jean Ferrat, c’est le chanteur engagé gauchiste, c’est celui qui mit en musique des textes d’Aragon. C’est le moustachu réfugié à Antraigues qui s’éloigna de ce monde de la musique pour vivre sa vie, dans les années 80-90. C’est une voix une personnalité…Et si pourtant ce n’était pas tout à fait vrai ? Car il est né à Vaucresson, pas forcément celui de maintenant mais tout de même, sous le nom de Jean Tenenbaum (on comprend le changement de nom d’artiste..) avec des origines juives russes et auvergnates. Père déporté dans les camps, caché par des militants communistes, il est marqué par la guerre ce qui donnera quelques chansons majeures. Et puis la fin de la guerre, la famille ruinée, les études contrariées, la musique comme passion, guitariste de jazz, vie de bohème. Il met en musique un premier texte d’Aragon dont il est admirateur, se fait connaître dans des premières parties, des cabarets parisiens. Il finit par signer chez Decca pour de premiers succès mais c’est avec Barclay que sa carrière décolle. Il écrit pour d’autres comme la musique d’une chanson qui me touche, « mon vieux », avant qu’elle soit retouchée par Daniel Guichard plus tard.

Mais bon tout ça, il y a des gens qui le raconteront mieux que moi, et des sites pour ça. C’était pour remettre dans le contexte de ce deuxième album chez Barclay, qui suit le célèbre « Nuit et brouillard ». J’ai choisi de parler de cet album pour la chanson « la montagne » au départ, celle que je peux passer en boucle. Il y a quelque chose de nostalgique, de contemplatif, ce qui vaut souvent dans ses chansons. Mais quelle drôle d’idée de commencer par une « berceuse », même si c’est une description assez crue du monde qui l’entoure. Il y a une autre version qui est augmentée de 2 titres et où la chanson n’est qu’en position 8. Mais le réveil sonne avec ce « Hourrah », ritournelle qu’on imagine venant du sud de la France sur des rythmes plus jazzy et presque hispaniques. C’est dansant, un peu loin de l’image qu’on a gardé d’un chanteur qui ne portait pas de moustache et était romantique.

J’aime d’ailleurs ce « Que serai-je sans toi » chanson d’amour à la jolie partition de guitare. C’est là que l’on voit le talent de mélodiste. Evidemment, il y a la voix grave et un peu traînante du chanteur, son lot de violons pour faire tomber les coeurs. Et puis un texte d’Aragon…je vous laisse deviner qui était la belle. J’ai eu du mal à appréhender « le jour où je deviendrais gros », titre jazz swinguant bien, plutôt caustique. Il faut le remettre dans le contexte de l’époque mais Ferrat assure sur cette rythmique, avec parfois des accents du Gainsbourg des débuts. En parlant de jeunesse, il y a « la jeunesse » de Georges Coulonges là aussi avec un arrangement jazz avec clarinette, piano et percussions. Efficace.

Mais la pièce d’orfèvrerie, c’est « La Montagne », texte et musique de Ferrat. On parle du passé, de paysans qui ont quitté leur pays, de paysages qu’on ne voit plus. Quelques arpèges de guitare suffisent sur le refrain…c’est l’éloge d’une vie simple, un peu sa quête finalement, déjà. On parle justement des HLM, des poulets aux hormones…le monde change, le productivisme. J’ai du mal à enchaîner sur ce swing jazz de « autant d’amours autant de fleurs » pourtant très réussi mais en décalage avec ce moment suspendu. Je préfère « au bout de mon âge », qui fait d’ailleurs très Brassens, qu’il côtoie à cette époque. Le texte d’Aragon y fait pour beaucoup et c’est pour moi une belle conclusion pour cet album au format 25cm de l’époque.

Ferrat a une place particulière pour moi. Il avait l’âge de mon père. Il était un des chanteurs préféré de mon grand-père, pour diverses raisons. Je l’ai découvert vraiment plus tard, vers 17-18 ans, touché par ces textes, surtout ceux d’Aragon. Et puis la Montagne, c’est un peu une partie d’une histoire familiale que j’y vois. L’album, ce format alors pas si populaire, est un peu étrange avec ce mélange de chansons profondes et de chansons plus légères et dansantes. A aucun moment on ne le trouve décalé dessus, ce qui montre l’étendue de son talent. Même si pour moi, il y a surtout Aragon, je trouve que le mélange prend bien à l’écoute pour justement ne pas être trop pesant ou rêveur. Alors il reste dans mon lecteur depuis quelques temps maintenant.

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Ecrit le : 16/07/2020
Categorie : musique
Tags : musique,chansons,france,1960s

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