BD - La Différence invisible de Mademoiselle Caroline et Julie Dachez (2016)
Ils et elles sont souvent invisibles. Ils ou elles sont vus comme différents quand ils parlent de ce dont ils souffrent : L’Autisme. Mais c’est plus souvent de notre regard qu’ils souffrent et pour changer cela, rien de tel qu’une BD. Celle-ci nous fait découvrir Marguerite, 27 ans, une jeune femme qui ne se sent pas à l’aise dans cette société.
Il s’agit d’une autobiographie, ou quasiment, celle de Julie Dachez qui ensuite est devenue Docteur en Psychologie sociale. Marguerite, c’est beaucoup d’elle, même s’il y a eu une mise en scène en cohésion avec la dessinatrice Mademoiselle Caroline. Marguerite travaille dans une grosse société, dans un open-space. Elle a un petit-ami, une vie bien rangée avec un départ à la même heure tous les matins, le détour par la boulangerie, l’arrivée avant tout le monde puis les collègues qui débarquent, le bruit, l’angoisse. Il y a aussi ce voisin dragueur qui l’importune sans arrêt, son ami qui l’emmène dans des soirées entre amis où elle s’ennuie. Associale ? Voilà ce que l’on pense d’elle, jusqu’à son “boss”. Mais un jour, elle découvre que ses symptômes ressemblent à l’autisme. Mais aucun médecin ou psy ne la croit. Il faut qu’elle se document elle-même et aille dans un centre spécialisé pour que sa vie change enfin !
Vivre en se sentant “malade”, anormal, voilà le pire pour les autistes. Ici il s’agit de l’Asperger, un nom générique qui n’est pas une description facile pour quelque chose qui prend bien des formes. L’ignorance des médecins, des psy, c’est le mal français sur l’autisme. La France est très en retard sur le sujet et avec cela, l’incompréhension des gens va de paire. Déjà que la différence est mal acceptée dans notre société, qu’il faut avoir des enfants, manger comme tout le monde, s’habiller avec un “dress code” non inscrit, faire croire que l’on apprécie les gens… L’autiste ne peut comprendre cela, a ses codes, ses angoisses, mais peut très bien le vivre. Marguerite le découvre avec d’autres personnes diagnostiquées Asperger, elle se crée son propre cercle d’amis, loin de cette société factice qu’on lui impose. Et elle apprend aussi à voir cela chez les autres, ce qui l’oriente vers sa nouvelle carrière.
Avec un dessin plutôt simple et épuré, le focus est mis sur l’histoire de cette femme, surtout que l’autisme est moins diagnostiqué chez les femmes. J’ai été très touché par ce récit pour des raisons que je ne pourrais dire ici. L’histoire me semble tellement juste, tellement forte et révoltante parfois qu’on a envie de dire au personnage de se barrer des situations dans lesquelles elle se trouve. Bravo à l’auteure qui balaye bien des clichés, remet les pendules à l’heure dans un pays où le handicap, quel qu’il soit, est bien maltraité.