BD - Le Cri du peuple de Tardi et Vautrin (1998)

Cette série de 4 tomes n’est pas l’histoire du journal Le Cri du peuple créé par Jules Vallès mais Lhistoire de La Commune de Paris par l’écrivain Jean Vautrin mise en image. Et pourtant… on retrouve justement Jules Vallès dans les protagonistes de cette fiction historique.

image

Difficile d’être neutre dans une telle histoire, un tel drame. Jean Vautrin est clairement à gauche politiquement et son point de vue reste celui des Communards, moins celui des Versaillais. Je ne vais pas reprendre ici toute l’histoire de ces quelques semaines de 1871, il y a d’autres sites pour cela… et cette BD. Nous suivons des personnages qui se retrouvent acteurs de cette petite révolution prolétarienne qui agita Paris. Il y a le Capitaine Tarpagnan, une certaine Gabriella Pucci dite “caf’conc”, Grondin l’ancien notaire, bagnard, et mystérieux policier, Hyppolyte l’espion ou bien encore des anonymes, des leaders éphémères comme “Fil-de-fer”, en plus de toutes les figures historiques (Louise Michel, Valles, Gustave Courbet…). Tardi nous les croque avec maestria dans ces quatres superbes albums au format à l’italienne. Ce format horizontal donne de grandes planches sur la Mairie de Paris, siège de ce gouvernement provisoire, ou sur les barricades, les canons de Montmartre, etc.

Si le dessin en noir et blanc de Tardi nous plonge parfaitement dans l’ambiance avec un foisonnement de détail dans une reconstitution historique, il faut y ajouter les dialogues. En effet, ils sont dans l’argot parisien de l’époque. On retrouve ce Paris décrit par Eugène Sue ou Victor Hugo. Il y a aussi un peu de Zola et … une pointe d’Edmond Dantès, le héros de Dumas, dans ce Grondin échappé du Bagne qui revient pour une vengeance. On entre dans la grande histoire et dans ces petites histoires parallèles qui se croisent et s’entrecroisent dans le sang. C’est passionnant mais surtout passionné dans tous ces drames, ces exactions de part et d’autres qui aboutissent à la semaine sanglante. Cette histoire là, nous l’oublions trop aujourd’hui.

C’était aussi l’histoire d’une utopie révolutionnaire et prolétaire qui montra vite ses limites, comme toutes les révolutions. Tardi et Vautrin ne s’attachent pas trop à décrire les débats qui déchirent les diverses factions en lutte. Ils s’intéressent surtout au peuple de Paris, celui du prolétariat des 18ème, 19ème, et autres arrondissements délaissés par la modernisation d’Haussmann. C’est aussi la fin des fortifications de la ville qui vont s’élargir d’abord après le conflit de 1870-1871 avant de montrer leur inefficacité. C’est le Paris d’une guerre civile, une guerre de classes. C’est une histoire de sacrifices vains, d’idéaux et d’amours impossibles.

Une série d’album qui est très dense, bouleversante à bien des égards et encore un classique de Tardi. On peut lui reprocher le militantisme mais pas tant que ça, tant ces albums montrent les massacres et vengeances perpétrés de part et d’autres. Âmes sensibles…

image


Ecrit le : 28/04/2020
Categorie : bd
Tags : 1990s,bd,communisme,histoire,1870s,révolution

Commentaires : par Mastodon ou E-Mail.