Cinéma - Un monde plus grand de Fabienne Berthaud (2019)
Adaptation du livre Mon initiation chez les chamanes de Corine Sombrun, ce film plutôt classique est une jolie respiration dans cette période de grosses sorties cinéma. On peut croire ou ne pas croire aux rites chamaniques à la base. Ce film a le mérite, comme le livre, d’expliquer ce que c’est et les mystères qui entourent ces pratiques.
Nous voilà donc partis en Mongolie, très au nord, dans un petit village de yourtes où les habitants élèvent des rennes. Mais pourquoi notre héroïne, Corine, part elle là bas ? Elle est ethno-musicienne mais elle vient surtout de perdre son mari des suites d’une longue maladie. Le voyage pour enregistrer des chants chamaniques dans le cadre de son métier lui semble une bonne manière de passer le deuil. Mais voilà que le jour où elle enregistre le rite d’une chamane, elle tombe dans une transe. Oyun, la chamane, lui fait comprendre qu’elle a aussi des dons pour être chamane.
D’abord incrédule, elle repart donc en France et se fait examiner par des médecins, des chercheurs. Mais devant l’incompréhension du monde médical face à ce qui lui arrive quand elle entend le bruit du tambour qu’elle a enregistré, elle décide de repartir….Je vous passe quelques détails qui ont leur importance. Le film va donc retracer le parcours initiatique de Corine avec Oyun jusqu’à ce qu’elle devienne Chamane elle-même et permette aussi à la science d’avancer dans la compréhension. Mais le film reste avant tout distrayant. Ce n’est pas comme certains critiques mal embouchés le disent, un “Voyage en terre inconnue” au cinéma. Il y a bien sûr de magnifiques images, du dépaysement et une rencontre avec les nomades mongols mais cela reste surtout un biopic. On retrouve des éléments de comédies avec quelques clins d’œil à Karaté Kid, pour nous les enfants des années 70-80 ! On rit, on pleure aussi avec le deuil et le tout fonctionne bien sans trop en faire. L’histoire vraie se suffit à elle-même.
Mais surtout, on ressort en s’interrogeant sur le chamanisme, d’autant que le film dit qu’il y a de faux rites faits pour les touristes. Le chamanisme a bien des formes selon les peuples avec divers moyens pour accéder aux transes. Mais le tambour utilisé se retrouve pourtant ailleurs alors que ces peuples n’ont aucun lien, sinon très lointains. Corine a-t-elle eu “ce pouvoir” parce qu’il y a eu ce décès, ce deuil, ce lien avec l’âme…Faut-il alors croire aux esprits ? Toutes ces questions montrent notre méconnaissance du cerveau humain, des liens avec le vivant qui nous entoure et remet même en question notre incrédulité face à des religions polythéistes, au paganisme etc…Tout est question d’interprétation avec nos repères et le film nous les fait perdre.
Pas indispensable, ce petit film (moins de 4M€ de budget) remplit sa mission avec une Cécile De France qui porte le sujet, des acteurs et actrices mongols pros ou pas, Arieh Worthalter et Ludivine Sagnier dans des seconds rôles et … le vrai professeur en neuroscience Steven Laureys. Le tout est bien servi par la photographie de Nathalie Durand avec quelques plans séquences magnifiques. A voir pour tous ceux qui ont l’esprit assez ouvert pour se remettre en cause.