Musique - Mireille Mathieu - Cinéma (2019)
Je cherchais un album pour rendre un hommage à la carrière de cette grande dame de la chanson. Et cette “compilation” me donne en plus l’occasion de parler de musiques de films, dont beaucoup m’ont enchantés.
Alors j’en entends déjà dire que c’est une chanteuse ringarde, has been… Ce à quoi je répondrais que le jour où un chanteur à la mode actuellement aura le 10ème de sa carrière à international on pourra en parler. Car pendant plusieurs décennies, elle a représenté LA chanteuse française dans bien des pays, jusqu’en Chine et en Russie ou au Japon. Et pour l’avoir revu chanter récemment, je suis assez époustouflé de voir sa qualité vocale qui frise toujours la perfection. Et pourtant, je n’aime pas trop la perfection, on y reviendra. J’ai grandi avec des disques d’elle à la maison et je lui reconnais ce timbre, ce phrasé avec ce léger accent d’Avignon, bien plus prononcé quand elle parle. Je regrette juste qu’elle ait eu assez peu de chanson “personnelles” par rapport à tous les standards qu’elle a su magnifier. Et dans cet album réunissant 40 titres, il y en a des standards….
Pourtant, il m’en manque quelques uns (Nos souvenirs/Memories ou Les Moulins de mon coeur, par exemple…). Il y a toujours des choix…. ou des problèmes de droit. Et au rayon déception, il y a quelques titres classiques francisés avec plus ou moins de bonheur. Pourtant, elle maîtrise suffisamment les versions anglaises, comme elle le prouve avec d’autres titres dans la langue de … Charlie Chaplin.
- Un homme et une femme (avec Francis Lai) Pierre Barouh, Francis Lai
- Over the Rainbow Harold Arlen, Edgar Yipsel Harburg
- Une vie d’amour Charles Aznavour, Georges Garvarentz
- De rêve en rêverie (Evergreen) Eddy Marnay, Barbra Streisand, Paul Hamilton Williams
- L’événement le plus important depuis que l’homme a marché sur la Lune Jacques Demy, Michel Legrand
- La bonne année Catherine Desage, Francis Lai
- People Bob Merrill, Jule Styne
- La plus belle chose au monde René Rouzaud, Paul Francis Webster, Sammy Fain
- C’est mieux comme ça Michel Jourdan, Nino Rota
- Amour défendu Eddy Marnay, Robert Jung, Christian Bruhn
- La voie lactée Pierre Delanoë, Mitchell Parish, Hoagy Carmichael
- Pas vu, pas pris Maurice Vidalin, Ennio Morricone
- C’est à Mayerling Jacques Plante, Francis Lai
- Les yeux de l’amour Burt Bacharach, Gérard Sire
- Les bicyclettes de Belsize “version anglaise” John Barry Mason, Leslie David Reed
- Paris en colère Maurice Vidalin, Maurice Jarre
- Soldats sans armes Maurice Vidalin, Maurice Jarre
- Adieu à la nuit Maurice Vidalin, Maurice Jarre
- Je suis là Philippe Gerard, Arno Babadjanian, Evegeny Evtouchenko
- Ami, la mort attend là-haut Maurice Vidalin, Ron Goodwin
- Une histoire d’amour Catherine Desage, Francis Lai
- The Way we were Alan Bergman, Marilyn Bergman, Marvin Hamlisch
- La marche de Sacco et Vanzetti Georges Moustaki, Ennio Morricone
- Deux petits chaussons de satin blanc Jacques Larue, Charlie Chaplin
- L’amour viendra Pierre Delanoë, Mack David, Max Steiner
- Les feux de la chandeleur Jean Dréjac, Michel Legrand
- Un jour tu reviendras Alain Lacour, Ennio Morricone
- Un regard d’amour Claude Lemesle, Vangelis
- Anna et Julien Eddy Marnay, Philippe Sarde
- Une fille au coeur cousu de fil blanc Pierre-André Dousset, Olivier Dassault, Christian Gaubert
- Plaisir d’amour Charles Level, Jean Claudric
- J’aime Paris Eddy Marnay, Cole Porter
- Don’t rain on my parade Bob Merill, Jules Styne
- Chez moi (Home) Eddy Marnay, Charlie Smalls
- Allons voir le monde (Ease on Down the Road) Eddy Marnay, Charlie Smalls
- Vive la musique (I got Rhythm) Ira Gershwin, Eddy Marnay, George Gershwin
- Jean qui Rit (Make ‘Em Laugh) Eddy Marnay, Arthur Freed, Nacio Herb Brown
- J’ai envie de chanter (Waiting for the Robert E. Lee) Eddy Marnay, L. Wolfe Gilbert
- If my friend could see me now Dorothy Fields, Cy Coleman
- New-York, New-York Eddy Marnay, Fred Ebb, John Kander
La liste ci-dessus vous donne le programme et quel programme. Il y a un large hommage à Broadway et à la période phare de la comédie musicale, les années 30-50. En fait, on s’aperçoit très vite que cet album est un voyage dans le temps. Mireille Mathieu n’essaye pas d’être ce qu’elle n’est pas, n’essaye pas d’adapter ces titres à aujourd’hui mais reproduit ces titres tels qu’elle les a ressentis. Les instrumentations et les orchestrations remettent les titres dans un contexte très fidèle à la date de sortie. Il y a des choeurs, il y a des big band ou des orchestres mais rien ne vient gêner la puissance de la chanteuse. Réenregistrement ou véritable compilation, on se pose la question… On se doute bien que le duo avec Francis Lai n’est pas récent. Mais on oublie rapidement cette question pour rester coi devant tant de talent, tant de précision dans le positionnement et la rythmique de la voix.
A l’image de la couverture de l’album, Mireille Mathieu semble immortelle, impossible à rattacher à une époque particulière. Les modes passent et trépassent, mais pas Mireille. Alors bien sûr, il me manque parfois cette cassure, ou cette folie que j’aime dans certains des titres (“Jean qui rit” par exemple issu de Chantons sous la pluie). Et pourtant j’aime y revenir…J’ai fait la comparaison avec la version de Joan Baez de “La marche de Sacco et Vanzetti”, chanteuse elle aussi à la voix si parfaite. La différence vient bien de l’arrangement, où Mireille Mathieu envoie directement sa puissance bien que nuancée, tandis que Joan va plus en progression. C’est un peu deux écoles qui s’opposent. Et dans l’école de la perfection, Mireille a toujours été au firmament. Il n’y a qu’à écouter son titre “Paris en colère”, qui fut un de ses premiers succès avec le film “Paris Brûle-t-il ?” pour s’apercevoir de cette force et cette émotion. J’ai plus de mal avec sa version française de “New-york, New-york” et pourtant difficile de lui trouver un autre défaut que … le français.
L’album fait la part belle à Francis Lai, Michel Legrand ou Maurice Jarre, ce qui permet de rappeler l’aura qu’ont eu ces compositeurs à travers le monde, comme leur interprète. On a donc un double hommage dans cet album avec à la fois la carrière de Mireille Mathieu et ces oeuvres intemporelles. J’ai parfois eu du mal à remettre les films en face des titres, notamment sur “I got Rythm” que je connaissais dans la version de Gene Kelly dans “Un américain à Paris” mais qui est apparu bien avant à Broadway ou dans le film “Girl Crazy” avec … Judy Garland (le magicien d’Oz….). On s’apperçoit que beaucoup des titres anglophones ont été enregistrés par Judy Garland, d’ailleurs et quelque part, Mireille Mathieu est un peu notre Judy Garland à nous, le destin tragique en moins.
“Cinéma” n’est pas un album indispensable mais permet au moins de remettre cette artiste dans la lumière qu’elle n’a jamais vraiment quitté, même si ce n’était pas en France.