Musique - Dur-Dur Band - Dur-dur of Somalia Vol. 1 et 2 (1986/2018)
Si cet album (disponible sur Bandcamp) est estampillé 2018, en réalité, c’est un retour dans les années 80. Il s’agit de la retranscription numérique de cassettes sorties par ce groupe dans les années 80-86 environ et faite par le projet Analog Africa, un label allemand qui s’est spécialisé dans la réédition de musique africaine “vintage”.
Nous voilà transportés dans la Somalie des années 80. Pour nous, ce pays est synonyme de guerre. De la fin des années 70 à aujourd’hui, le pays a basculé peu à peu dans un chaos inextricable, faisant de Mogadiscio l’une des villes les plus dangereuses au monde. Mais avant cela, c’était aussi un pays prolifique au niveau musical sachant mêler les sonorités africaines aux musiques en vogue ailleurs. C’est le cas de ce groupe, Dur-Dur Band à ne pas confondre avec Dur-Dur Band International London, un revival plus tardif.
Quand je parlais de métissage de sonorités, c’est ici le cas avec un savant mélange de rythmiques d’Afrique de l’est, de Reggae, de Funk, de Disco. Il y a évidemment un son très rétro mais en ces temps où l’on sort de pales copies de la soul, la funk et la disco des années 70-80, on peut prendre quelques leçons avec ce groupe. La qualité des musiciens ne suffit pas, il faut aussi des voix, des titres qui fascinent. C’est la cas, par exemple de la chanteuse Sahra Abukar Dawo. Mais il y a des sons lancinants, captivants. Si tous les titres ne sont pas complets ou avec un son au top, on prend tout de même du plaisir à les entendre. Il y a même une cover d’un titre de .. Manu Di Bango.
Cela nous rappelle aussi le problème de la diffusion de la musique en Afrique avec le piratage, le manque de moyens d’enregistrement, mais aussi … l’interdiction de la pratique musicale dans certaines contrées. Au point que j’ai eu du mal à imaginer les concerts de l’époque dans cette ville, cette ambiance festive et en même temps plein de profondeur soul, parfois proche d’une trance avec cette rythmique qui ne vous lâche pas. Sur les 18 titres, il y en a un peu pour tous les goûts mais pourtant à l’écoute, cela paraît homogène. Evidemment, on a des rythmiques chaloupées de reggae et des basses très présentes de disco-funk avec ce chant somalien dont j’ignore évidemment la signification… Malgré cela, le temps ne semble pas avoir vraiment de prise sur ces enregistrements.
L’éditeur a fait appel à un des anciens membres pour créer un livret racontant l’histoire du groupe. Les membres sont disséminés dans le monde ou décédés pendant les nombreux conflits du pays. Mais ce double-album permet de prolonger un peu plus la vie du groupe et de regarder avec tristesse et nostalgie la Somalie… Mais aussi avec espoir d’un retour au calme.