Littérature et Cinéma - Charlie Chaplin de Peter Ackroyd (2016)
Cela faisait un moment que je n’avais pas trainé dans le rayon cinéma d’une bibliothèque. Mais que ne ferais-je pas pour Charlie Chaplin dont j’avais déjà lu une biographie, d’ailleurs.
Mais souvent les livres insistent sur les anecdotes de tournage, les secrets des films en agrémentant cela d’un regard de critique cinéma. Ici, il se trouve que c’est un romancier et critique littéraire qui s’attaque à ce monument du cinéma, donc je m’attends à avoir un truc différent. Et quelle n’est pas ma surprise de voir que le traducteur, Bernard Turlé, n’est autre qu’un de mes anciens profs d’anglais de collège, mon préféré, en plus. Il semble avoir fait une carrière dans la traduction et l’écriture, d’ailleurs.
Ne partant donc pas en terrain inconnu, je m’aperçois aussi que le livre est plutôt court (284 pages), ce qui est atypique dans ce style. Et en parlant de style, c’est très différent, en effet puisque l’auteur s’oriente très vite vers une sorte de portrait psychologique, essayant de faire le lien entre les expériences de jeunesse du jeune Chaplin et les sujets qu’il traita au cinéma. On y croise alors des personnages oubliés du grand public, des tragédies. Je retiens par exemple Dan Leno qui va beaucoup inspirer Chaplin dans la construction de Charlot, mais qui a une vie qui pourrait faire un sujet de film. Il y a aussi Fred Karno, celui qui va lancer Charlie, qui lui revaudra, …. et qui a aussi dans sa troupe un certain Stan Jefferson, qui deviendra Laurel, de Laurel et Hardy.
L’enfance de Chaplin dans Kennington est digne de Dickens, avec sa mère devenue folle, son père alcoolique, ce qui construit l’homme Chaplin qui aura peur de finir dans l’alcoolisme et la folie. Ackroyd tente des hypothèses, bâtit des ponts entre ces périodes, essaye de faire la synthèses des traces qu’il a trouvé mais à la différence d’une biographie, ne parsème pas son récit de notes de renvoi bibliographique. Cela aide considérablement à la lecture et garde un style très littéraire. Car cela se lit véritablement comme un roman et très, trop vite. Je me suis posé la question : “Est-ce le livre qu’il faudrait faire lire à quelqu’un qui ne connaît pas les films de Chaplin?”. Sans doute pas, car en dehors de quelques anecdotes de tournage, on “visualise” mal le style Chaplin. Eventuellement, il peut pousser à revoir des films, c’est vrai, notamment pour mieux comprendre les liens entre le personnage et l’homme. Mais ce n’est pas une véritable biographie de cinéma au sens classique du terme.
L’ouvrage n’en est pas moins intéressant, pour la fascination qu’exerce toujours Chaplin, bien des décénies après sa mort et plus d’un siècle après ses débuts dans le music-hall. Il ne ménage pas le personnage, c’est le moins que l’on puisse dire. Comme souvent chez ces grands acteurs, le coté humain est moins reluisant et ici le Dictateur n’était pas que sur la pellicule, mais sur les plateaux. Qu’importe pour les grands moments de cinéma qu’il laisse. Comme toujours, il faut faire un petit détour par Archive.org pour voir des films de cette époque. On y trouve même des films avec son frère Sydney.