BD - Pluto de Naoki Urasawa (2004)

Ces dernières années, Naoki Urasawa s’inscrit comme un des mangakas les plus passionnants, à travers des séries comme Monster ou 20th Century Boys. Alors quand il rencontre les héros du maître Osamu Tezuka, ça ne peut être qu’explosif.

Je me dois de resituer un peu tout ça, pour toi lecteur qui n’est pas familier avec les mangas. Osamu Tezuka est un des grands maîtres du genre, à qui l’on doit donc des oeuvres comme le Roi Léo (que Disney pillera pour le Roi Lion), des oeuvres très ambitieuses comme son Métropolis (adapté en film par un de ses collaborateurs 50 ans plus tard et inspiré du film de Fritz Lang), ou bien encore les Trois Adolfs que j’ai traité ici. Et puis il y a la réalisation d’animés à partir de ses oeuvres. Pour un enfant des années 70-80, il y a Astro le petit robot, la première série animée japonaise, dit-on. Nous sommes encore très loin des Goldoraks, et comme toute l’oeuvre du maître, elle est teintée d’humanisme avec un fond pacifiste. Il est aussi connu sous le nom d’Astro Boy, a eu droit à des jeux vidéos, et son héros est aussi appelé … Atom, ou Shin Tetsuwan Atom.

En video : video

Vous allez me dire, alors, quel rapport avec Pluto etc… Déjà, aucun rapport avec le Pluto de Disney mais plutôt le dieu Pluton. Ensuite, il s’agit d’une suite à Astro, fruit d’une rencontre entre Naoki Urasawa et le fils de Tezuka, Makoto qui souhaite en fếter l’anniversaire de la création. On retrouve donc le personnage d’Atom ainsi que le professeur qui l’a créé, Ochanomizu. Mais Urasawa nous emmène dans son style habituel, le polar, au coté d’un robot enquêteur, Gesicht, qui suit une affaire où tous les robots les plus puissants du monde se font détruire. Dans ce scénario, il nous emmène au source du conflit mondial qui opposé quelques années auparavant le camps du bien (les Etats-unis de Thrace) à celui dit du mal (la Perse), dans lesquels des robots alliés furent construits pour détruire l’ennemi. Après la guerre, les robots et les hommes tentent de vivre ensemble, dans l’égalité, ce qui ne manque pas de soulever des inimitiés.

Pluto est réparti en 8 tomes d’une richesse très rare, même dans le style Seinen (manga adulte). On retrouve les lois dites d’Asimov et leurs paradoxes. On retrouve un héros qui n’est pas sans rappeler celui du Blade Runner de Philip K. Dick. On retrouve une thématique politique sur le racisme, comme ce qui fut abordé dans la série Real Humans. Enfin, on retrouve des éléments d’histoire contemporaine, comme le conflit du proche orient, les armes de destructions massives, etc… Je dis enfin car j’en ai déjà dévoilé beaucoup. Le scénario est extrémement bien fait, parvenant à garder en haleine le lecteur sans se perdre trop, comme souvent dans les mangas, ou sans prendre trop de raccourcis. Il y a tant d’éléments, de points de comparaison avec d’autres oeuvres qu’on pourrait presque en faire une thèse.

image

Stylistiquement, on retrouve le style Urasawa, très fouillé, précis, à l’image d’un Ryoichi Ikegami, par exemple. Il faut voir la qualité des planches qui décrivent les grandes mégalopoles ou les quartiers de l’Istanbul du futur. Et puis il y a la retranscription des personnages de Tezuka, qui ne font pas dans l’imitation. On retrouve les qualités humanistes de l’oeuvre de base, avec une place laissée aux animaux, notamment, à la nature. L’éditeur français Kana a respecté le découpage original et c’est tant mieux. C’est tellement bien qu’on a envie de prendre son temps à le lire. Il y a plusieurs niveaux de lecture, selon l’age ou le niveau de culture du lecteur (car si je n’avais pas lu Asimov, Dick etc, verrai-je les rapports?). Un petit chef d’oeuvre pour moi, donc, que je ne me lasserai pas de relire, je pense.


Ecrit le : 14/03/2017
Categorie : bd
Tags : 2000s,bd,guerre,LittératureetBD,manga,naokiurasawa,osamutezuka,pacifisme,robot,robotisation

Commentaires : par Mastodon ou E-Mail.