Cinéma et BD - Ghost in the Shell de Masamune Shirow (1989)
Avec la sortie de l’adaptation hollywoodienne de Shirow, je ne pouvais manquer de parler de cette oeuvre phare du manga cyberpunk japonais… et de comparer au passage le manga, l’adaptation du Oshii en 1995 et celle-ci.
Quand j’ai entendu qu’on adaptait ce Seinen, avec de vrais acteurs, et aux USA, j’ai eu déjà un frisson. Le fait d’avoir la sculpturale Scarlett Johansson comme héroïne, n’était pas suffisant pour me rassurer. Et Rupert Sanders, c’est qui déjà? “Blanche neige et le chasseur”…ouh la! Bon, revenons aux sources avec ce manga que j’achetais dans les années 90 dans sa première édition Glénat :
“Le personnage principal est un cyborg de sexe féminin du nom de Motoko Kusanagi. Kusanagi fait partie d’une section d’élite anticriminelle, la section 9. Elle traque un cybercriminel connu sous le nom de « Marionnettiste » (Puppet Master). Ce cybercriminel prend le contrôle de l’esprit d’un humain par l’intermédiaire du Réseau Numérique mondial, évolution d’Internet. Alors que l’enquête progresse, la section 9 finit par découvrir que le criminel n’est pas une personne physique mais une …”
Je suis obligé d’arrêter là, car sinon, je dévoile tout du film. Et justement en regardant le film, alors que je n’avais pas relu le manga depuis 10 ans, j’ai eu la curieuse impression de voir une autre histoire :
“Dans un futur proche, le Major est unique en son genre : humaine sauvée d’un terrible accident, son corps aux capacités cybernétiques lui permet de lutter contre les plus dangereux criminels. Face à une menace d’un nouveau genre qui permet de pirater et de contrôler les esprits, le Major est la seule à pouvoir la combattre…”
La principale différence tient dans le manichéisme très présent dans la version Hollywoodienne. Je n’ai pas parlé de la version d’Oshii car elle est très fidèle au manga, le réalisateur se délectant de cet univers dont il a montré la maîtrise des codes dans le culte Avalon, 6 ans plus tard. Dans l’oeuvre de Shirow, il y a un énorme travail sur le fond, l’univers qui sera développé par des prequels et suites. C’est même à l’excès dans les détails techniques. On peut le prendre pour une enième histoire de Méchas, ou bien une intrigue policière, une histoire cyberpunk ou une fable plus philosophique. C’est un manga/film à tiroirs. Ce que je craignais avec la version hollywoodienne est arrivé. On a simplifié l’histoire jusqu’à la modifier et parler plus des risques de la modification humaine, flirtant avec le thème du transhumanisme, si à la mode. Le scénariste a vidé le film de sa substance, mais malheureusement garde aussi sa difficulté de lecture/compréhension.
Esthétiquement, c’est plutôt réussi avec une ville à la Blade Runner. Mais comme les capitaux sont chinois, on a droit à des endroits bien connus de Shanghai et Hong Kong. Le look sexy de l’héroïne est conservé mais on pense parfois à des scènes de jeux vidéo. Le méchant nous fait son Assassin’s Creed et Scarlet sa Mirror’s Edge. On nage dans la profusion de scène d’action et au milieu, on a le japonais de service, le grand Beat Takeshi (le nom d’acteur du réalisateur Takeshi Kitano), qui fait le minimum. Batou est plutôt bien incarné, rappelant au passage les gros costauds seconds rôles des Final Fantasy. Mais pou le coup, le manga était sorti avant…
Si je prends le film indépendamment du manga, ça reste un honnête film d’action à tendance cyberpunk. Ca ressemble à un A.I ou un I.Robot, sans la profondeur. C’est propret, convenu et sans surprise, à tel point que quand j’ai vu le cadrage de la scène finale, je savais déjà ce que le réalisateur allait faire dans les 30s. Mais au moins, il a un intérêt : Pousser à voir le film d’Oshii ou bien lire le manga. Et pendant qu’on y est, on peut lire aussi Appleseed et Orion,qui sont aussi complexes que celui-ci, une fois qu’on gratte la surface.