Web - Petite histoire d'un internaute - 1996 à 1999
C’est en voyant des jeunes bacheliers curieux de comprendre les méandres de l’internet que je me suis revu à mes débuts, il y a pratiquement 18 ans. L’occasion de raconter ma petite histoire du web, où peut-être d’autres se retrouveront…
Nous sommes donc en 1997. Cela fait déjà 2 ans que j’ai eu mon premier PC, une minitour blanche emmenée vaillamment par un processeur pentium à …75MHz et un disque dur d’1Go. Depuis, je me suis offert un sacré bel upgrade avec un processeur à 200MHz, que je finirai par overclocker à 233Mhz. Une fusée avec ses 128Mo de RAM ! A cette époque, je sors d’un camp de vacances forcées de 10 mois en Alsace, tous frais payés par l’état. Bref, ça vous situe l’age de l’auteur. Et je me suis payé mon premier modem, un superbe USRobotics 56k, le top du top en ligne analogique. Accessoirement, ça émule le minitel mais ça permet surtout l’accès à cetruc qui fait beaucoup causer dans les revues spécialisées : Le Web, Internet, … Parmi les lauréats de ma promo, je suis un des pionniers à être sur le net, un truc apparu réellement depuis 1995. Le site de mon école est encore indigent et on a une liste des anciens élèves qui tient sur une seule page.
Mais pour tout ça, il y a un problème. Il faut utiliser la ligne téléphonique et pendant ce temps, impossible de recevoir un appel ou d’appeler. Et non content de payer la communication du modem, on paye un abonnement au fournisseur d’accès. 1h d’Internet a un coup colossal pour un jeune. Et avec la vitesse d’un modem, il faut être vraiment patient. A cette époque, on parle à peine d’une nouvelle technologie révolutionnaire : l’ADSL. En attendant, on fait ses recherches sur Altavista, un site développé par DEC qui sera avalé par Yahoo, plus tard. J’accède au net par un des fournisseurs les plus grands public : AOL, qui balance des millions de CD de connexions dans les magazines. Ca servira plus souvent à effrayer les étourneaux dans les cerisiers. C’est une interface propriétaire, bouffeuse de ressources, cousue de bugs mais qui met une surcouche bien utile aux débutants et à ceux qui ne veulent pas mettre les mains dans le cambouis. J’en aurais vite vu les limites : Je passe chez Club-Internet 1 an plus tard. Mais avec une connexion lente, Internet n’est pas encore ce que l’on connait aujourd’hui. Il n’y a quasiment pas de boutiques ou de commerce. Il n’y a pas de wikipedia, ce qui laisse de la place aux encyclopédies en CD. Il n’y a pas de streaming, pas de contenus audio ou video. Les sites sont en HTML avec des frames, des images en GIF voir en JPEG. On ne crée pas son site avec un CMS genre wordpress. Bref, on défriche, on essaie, on crée, on apprend en marchant.
Pour aller voir une page web, il n’y a pas une pléthore de “navigateurs”. Après Mosaic, on peut utiliser Netscape Navigator et depuis peu, Internet Explorer qui est fourni avec un windows un peu plus fiable, la version 98. C’est la première guerre des navigateurs qui sera finalement remportée par Microsoft…mais qui lui amènera des problèmes avec la communauté européenne. Pour créer une page web, pas d’autre choix que de taper du code HTML ou d’utiliser un éditeur Wysiwyg du genre de Netscape Composer ou pire, Microsoft Frontpage. Dreamweaver arrivera bien plus tard… Au départ, on essaie d’héberger ça sur de nouveaux hébergeurs qui financent souvent cela par de la publicité. Le fournisseur d’accès laisse un maigre espace pour créer sa page perso et on a déjà des outils ftp peu différents de notre filezilla préféré. Alors on se fait sa petite page toute simple, sans base de données, sans php, sans flash, sans animation, à peine quelques images qu’on a du mal à uploader. On y parle d’une passion du moment, sans vraiment d’espoir que ce soit lu. On se fout royalement de l’audience, de statistiques à part un petit compteur à l’efficacité douteuse (visites, hits, robots, ???) . On garde le contact avec ses ex-camarades de promo par mail…qu’on envoie dans l’en tête d’une lettre papier ou par coup de téléphone. Les services phares sont les annuaires, le moteur de recherche, bref, une sorte de super minitel en couleur. La révolution du haut débit n’est pas encore là, donc on communique autrement.
La messagerie instantanée est déjà là par contre . On a les canaux IRC évidemment avec des conversations complexes à suivre. Et puis on a AIM, le messager instantanné d’AOL, concurrencé par ICQ et sa petite fleur. Il est de bon ton d’afficher son numéro ICQ dans sa signature…comme certains le font aujourd’hui avec Snapchat. La fleur a fanné et même son successeur Microsoft MSN Messenger a disparu. Sinon, on a les newsgroups, qui vivotent toujours pour les spécialistes qui regorgent de discussions et de ressources. On y accède selon le bon vouloir de son FAI et là, rien n’a changé.
Déjà, le web est une mine de ressources de tous genre. Les demomakers mettent leurs créations en ligne et il faut s’accrocher pour trouver la bonne config mémoire pour que Windows daigne la faire tourner. Pas encore de MP3 mais des mods pour les trackers issus de l’Amiga, qui migrent maintenant sur PC. Mod4Win sera longtemps mon compagnon préféré. Les magazines fournissent des CD avec des tonnes d’utilitaires “amateurs” qu’on appelle Sharewares ou freewares, des pilotes pour le matériel, etc…Cela évite de squatter chez celui qui est “connecté”. Alors on s’échange les trouvailles avec une disquette, un disque dur amovible ou un graveur CD…un 2X qui met des plombes à nous faire une disque dans un bruit inquiétant à la limite du plantage logiciel. J’attendrais la génération des 8X pour cela. Bref, le réseau social est dans la vie réelle avec des points de rencontre que sont souvent les boutiques informatiques.
Et pour le jeu en réseau, je rigole encore de cette partie de GP1, le jeu de Geoff Crammond entre mon PC et l’Amiga d’un ami avec un cable “null modem” (un cable RS232 croisé en réalité) entre les deux. Une bonne heure pour comprendre comment cela fonctionne et pourtant, cela marchera malgré deux systèmes d’exploitation différents. Impossible d’imaginer une communication en modem pour l’instant et il n’y a pas de jeux prévus pour cela encore, ou si peu. D’ailleurs, le FPS se résume souvent à un jeu : Doom. Des dérivés fleurissent comme Hexen et surtout Quake qui fait réver les possesseurs de carte 3D. Mon PC n’ayant pas cet additif, je me contenterai de modestes FPS en shareware pour se faire la main.
A suivre…