Environnement - Comment l'indécision a ruiné l'agriculture
L’agriculture Française est encore dans le leadership européen. Pourtant, elle se trouve menacée, ayant hésité dans sa nécessaire conversion.
Ces derniers jours, le gouvernement français est attaqué de toute part par les agriculteurs : céréaliers, maraîchers, éleveurs, producteurs laitiers, tous s’y mettent, plus ou moins manipulés par des fédérations “patronales” jouant un double jeu comme la FNSEA (cf son dirigeant également PDG d’une multinationale de l’agroalimentaire). Au coeur du problème, une concurrence internationale et des grossistes voulant conserver leur marges. ça c’est la vision qu’on nous donne. Mais le véritable problème est de savoir ce que l’on veut faire de l’agriculture en France.
D’un coté, on a la solution productiviste, l’usine à vache (comme celle dite des “1000 vaches”), à porc (aujourd’hui déjà en France, pays qui ne respecte pas les normes de surface pour les gestations des truies : 2,25m2 !) ou à poulet (35 jours au lieu de 81 jours avant abattage, ce qui reste ) qui se fiche de la qualité et de tout bien être animal. C’est le modèle américain et par extension d’Europe du nord. Il faut automatiser, limiter les coûts, utiliser une main d’oeuvre si possible bon marché, utiliser des alimentations OGM de mauvaise qualité, limiter le temps de croissance des animaux, utiliser des hormones et des médicaments. C’est ce qui alimente les supermarchés et donc la majorité de la population et qui donne l’illusion d’une conservation du pouvoir d’achat. Pour les plantes, c’est l’utilisation d’OGM, d’engrais, de pesticides, d’une main d’oeuvre au noir, comme ce que l’on peut voir en Espagne par exemple. Mais les pays du tiers monde et les pays émergeants se mettant à utiliser les même techniques, on se retrouve peu à peu vers une course en avant sans avenir.
D’un autre côté, on a la solution de montée en gamme. Bio ou pas, il s’agit de proposer un produit respectueux et sain, un produit local mis en valeur localement (abattage local, transformation locale …). C’est le porc élevé en plein air, la volaille bio de plein air (et non le poulet Label, norme intermédiaire créée par la filière!), les vaches qui restent en pâturage, les légumes non issus de serre. Mais revers de la médaille, cela donne des produits plus chers, qui n’intéressent pas ou peu les supermarchés, qui ne font pas de volume mais c’est une marge plus importante pour le producteur. Le consommateur se voit alors contraint de changer ses habitudes, de ne plus manger de viande tous les jours (ce n’est pas utile…), de manger des légumes de saison. En corollaire, on a aussi moins de transport donc moins de pollution.
Oui mais voilà, la politique agricole commune et donc la politique agricole française pousse à la première solution, celle qui est condamnée dans un avenir de plus en plus proche. Les subventions au bio sont toujours en retard malgré une demande croissante. On importe donc de pays en périphérie de l’Europe. Les consommateurs, à force de crises sanitaires, changent leurs habitudes et on peut même penser qu’une offre plus importante de produits haut de gamme parviendrait à tenir des prix raisonnables pour tout le monde. Il convient donc d’adopter une bonne gouvernance et de cesser cette indécision qui ne fait que tuer à petit feu l’agriculture. En ayant une politique volontariste pour tirer vers le haut la qualité française, nos gouvernements à venir pourraient, à défaut de garder un nombre d’agriculteur égal à aujourd’hui, permettre à ce secteur d’activité de vivre dignement et avec le respect de sa population. Mais ça, ça s’appelle tout simplement le courage politique.