J’ai eu l’occasion de revoir ce film assez récemment et de ne pas ressentir les choses comme au premier visionnage. Il faut dire que j’ai beaucoup lu et vu au sujet de cette guerre du Vietnam

Si le titre original parle d’un «chasseur de cerf», le titre français est moins énigmatique, surtout accompagné d’une affiche comme ci-dessous. On comprend qu’on va parler de la guerre du Vietnam mais pas forcément des séquelles que laisse ce conflit aux soldats US. Dans un contexte comme la fin des années 70, début des années 80, nous sommes dans la guerre froide et l’arrivée imminente de Reagan au pouvoir. Tout cela nous donne un film qui traite bien son sujet mais fait parfois un peu trop dans le «gentil américain vs méchant vietnamien». La guerre a aussi ceci de terrible qu’il y a des nuances. En choisissant de parler d’un groupe de jeunes ouvriers blancs envoyés au Vietnam, il y a aussi un choix du réalisateur. Certaines critiques furent vives dans le contexte de l’époque. Je le regarde avec mes yeux d’aujourd’hui et ça me dérange (même si par ailleurs il y a des personnages secondaires noirs ou asiatiques, …). Les crimes de guerre furent évidemment des deux cotés et le film masque totalement cela.

Alors il faut le regarder uniquement sur le sujet des séquelles. On voit d’abord la joie d’un mariage, des jeunes qui bossent à l’usine et tentent de se distraire de la dureté de la vie. Des jeunes qui chassent le cerf, donnant une image très «western» ou pionnier à ce petit groupe. Sauf que les indiens sont remplacés par des soldats vietnamiens. Mickael (Robert De Niro) est le dur, celui qui veut mener le groupe. Steven (John Savage) est le jeune marié. Nick (Christopher Walken) semble le plus mature, du moins en apparence. Mais on retrouve ce groupe dans le conflit, sans vraiment savoir ce qu’il s’est passé entre. Ils sont déjà changés. Prisonniers des vietnamiens, ils subissent une terrible torture physique et psychologique. Ils y découvrent la «Roulette russe», ce «jeu» consistant à parier sur le fait qu’une balle dans un pistolet peut vous tuer ou pas. Une sorte d’allégorie de la guerre, elle même. Mais dans ce jeu, il n’y a pas que la balle qui agit.

Le plus intéressant du film n’est pas dans les scènes de torture et d’enfermement, inspirant la nausée mais nécessaires. C’est dans ce retour au pays, le regard de la communauté face à ces soldats : Mike reste le dur, en apparence. Steven est revenu brisé physiquement et Nick psychologiquement. Evidemment, il est impossible pour chacun de reprendre une vie normale. Pourtant, on ne voit pas encore ce regard critique d’une partie de la population face à ces soldats «perdants», ou même face à ce conflit jugé illégitime par une partie de la population. Cela aurait rajouté à la difficulté de réinsertion de ces jeunes déjà usés par la vie. Mais Cimino fait le choix de ne surtout pas critiquer la politique US passée ou présente, jusqu’à ce final…patriotique? Si on fait abstraction de ces défauts, le propos est fort, la mise en scène assez réussie. Et puis quelle interprétation avec l’intensité de DeNiro, le magnétisme de Walken qui font presque oublier le jeu de Savage, ou la présence de Merryl Streep (Linda, la petite amie de Nick). On ne ressort pas indemne du visionnage mais il faut aussi accepter de voir la réalité dans sa globalité.

Pour chaque conflit armé, il y a des films qui sortent quelques années après et d’autres qui attendent d’avoir une vision plus globale. Si on compare ce film à Apocalypse Now (1979) ou Rambo (1982) ce n’est pas vraiment la même vision. Mais pire encore si on élargit le champ à Birdy (1984), Full Metal Jacket (1987), Good Morning Vietnam (1987), Platoon (1986) et Entre Ciel et Terre(1993), Né un 4 juillet (1989) le triptyque d’Oliver Stone. Voilà pourquoi aujourd’hui je ne mettrai plus ce film dans le top 5 sur ce sujet, bien qu’il aborde un sujet indispensable à la compréhension du conflit.

Ce film fait partie du challenge IMDB Top250

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