Cinéma - Pulp Fiction de Quentin Tarantino (1994)
J’ai mis étrangement plus de temps à voir ce film de Tarantino que les autres de ses premiers films. Comme si on en avait trop fait, à l’époque. Alors, coup de génie ou pas?
J’avais d’ailleurs l’impression d’un phénomène plus français qu’Américain car le film n’avait pas fait un carton au Box Office US. 100 Millions de dollars en 27 semaines, c’est pas mal mais on a vu mieux (12ème au box office monde). Sauf que c’était un «petit film» (8 millions) sur lequel avait misé Miramax, la boite de prod des Weinstein, des pros du lobbying. Auréolé d’une palme d’or à Cannes, il a mis Tarantino dans la lumière, et avec lui, le film de crime dans un genre plus caricatural que d’ordinaire. Car comme son nom l’indique, c’est une sorte d’équivalent cinématographique du roman de gare, les Pulps pour les américains, ces magazines bon marchés qui publiaient des histoires fantastiques ou criminelles. Un genre qui vit émerger quelques pointures de la SF au passage (Asimov, Lovecraft, Anderson, Heinlein, Herbert…). Mais c’est plus le polar, pour Tarantino. L’affiche rappellerait presque un SAS bien français…avec sa très brune Uma Thurman.
L’intrigue ? C’est compliqué car ce sont plusieurs histoires imbriquées dont le lien échappe d’abord au spectateur. Le lien est que ça se passe à Los Angeles dans la pègre avec des tueurs, des boites de strip tease, des la boxe truquée, un peu comme si on lisait trois nouvelles dans un pulp magazine. Mais ces histoires ne seraient rien si le casting n’avait pas pris des gueules, ou des stars sur le retour : John Travolta a du mal à cette époque et Bruce Willis commence à vieillir. Samuel L. Jackson végète dans des seconds rôles….même dans le précédent Tarantino. Keitel a la gueule de l’emploi depuis très longtemps, et Uma Thurman avait déjà montré de belles dispositions dans divers styles. Tarantino avait réussi à convaincre ce casting pour un prix finalement contenu. Un signe d’un bon scénario ? Peut-être bien. Et pourtant, ça ne m’avait pas convaincu à l’époque, habitué aux fims noirs classiques que j’étais, ou à leurs remakes plus ou moins réussis.
Je n’avais pas été plus emballé que ça par True Romance, un peu plus par Tueurs nués, les premiers scénarios vendus par notre réalisateur débutant. Réservoir Dogs aura ma première faveur mais sans plus. J’avais plus aimé Jackie Brown, d’un déroulé peut-être plus classique, sans cacher ses liens avec celui-ci. Mais il y avait ce problème de stylisation de la violence. J’avais gouté au film de crime hongkongais donc ça ne me paraissait qu’une sorte de copie made in Hollywood…en moins bien pour la chorégraphie. Mais je n’avais pas alors capté l’aspect parodique de la chose et l’humour qui va avec, via les dialogues. Jackie Brown était finalement une meilleure introduction pour moi. Il fut donc le troisième au visionnage et j’ai adhéré à ces histoires et ces personnages caricaturaux (un peu plus que Snatch de Guy Ritchie, finalement…qui faisait un peu réchauffé 6 ans plus tard). Tarantino avait bourlingué dans les cinémas bons marché de L.A. et fait son éducation dans les films de Blaxploitation et les thrillers des années 70, une période qui n’avait pas forcément ma faveur. Alors forcément, certaines références pouvaient m’échapper, comme d’autres ont ma préférence.
Le film fut tout de même un coup de poing par le style sans concession du bonhomme. Il le poussera un peu trop loin plus tard, à mon goût, mais ça avait de la gueule et ça en a toujours. On reconnaît la patte du réal, et ça c’est déjà rare. Au point qu’il sera justement copié. Quand on se souvient de scènes et de dialogues quelques années après, c’est plutôt bon signe non ? Tarantino démontre à son tour que même une histoire de crime plutôt banale d’apparence, même des personnages de losers magnifiques peuvent permettre de faire un bon film. Évidemment qu’il intégrait beaucoup de ce qu’il avait vu et il ne s’en est pas caché (Cf Kill Bill, Jackie Brown…). Il en fit la synthèse dans ce film qui est l’un de ses plus aboutis, sans être mon préféré. Peut-être parce qu’il regarde trop le passé ? A voir.
Ce film fait partie du challenge IMDB Top250