Musique - Kent - Le temps des Ames (2014)
Voilà 30 ans que le chanteur Kent nous fait le bonheur de sortir régulièrement des albums et autant d’années de bonheur pour l’auditeur, sans faire de vagues ou de hits. Avec le Temps des âmes, en sera-t-il de même ?
Kent est un artiste polymorphe, aussi à l’aise avec la plume qu’avec une guitare, un piano (ici celui de Marc Haussmann) ou un même un pinceau ou un crayon. Après son époque punk de Starshooter, il a pris un virage dans la chanson française avec bonheur, mélant son sens mélodique avec des textes ciselés et en phase avec leur époque. Le rare album “live” de sa carrière donnait déjà l’occasion de ressentir encore plus la puissance de ses chansons qui s’exprime plus par les mots que par la tonitruance des instruments. Avec ses voyages, il nous a emmené dans différentes contrées et cette fois c’est à Berlin qu’il s’est arrété.
Ses 50 ans passés, il affiche un regard nouveau à travers cet album. Il se tourne vers le passé, sa relation à l’âge, comme l’exprime bien la pochette de l’album où son visage apparaît plus buriné que jamais.En effet, le ton général est nostalgique et mélancolique, exprimant son amour pour sa moitié, notamment dans le très beau “Notre amour”. Il se retourne sur sa jeunesse et son aspiration à vouloir encore “faire jeune” comme dans “Jeune con”, sorte de monologue du chanteur face à lui même. Il fait mouche sur les travers de notre société, que cela soit le superflu que nous apporte la technologie, dans “Superficiel” ou cette course vers un progrès qui se révèle plus destructeur que libérateur dans “Face à la lumière”. Il chante tout cela en nous promenant dans Berlin avec quelques interludes instrumentaux ambiancés. Il y a des faiblesses, comme dans tout album, surtout dans la deuxième partie où les refrains se font approximatifs. Mais pour qui tend l’oreille et l’écoute plutôt que de l’entendre, pour qui se laisse bercer par sa poésie qui se rapproche comme jamais de celle d’un Higelin (le père, pas le fils avec qui il a fait quelques duos), il y a une fascination qui s’installe. Peut être aussi pour un auditeur qui sera sensible aux thèmes abordés. Pour ma part, je retiendrais “Passion Killer” qui aurait pu clotûrer de manière parfaite cet album, sans interlude final.
Elle se moque des beaux discours
Elle se rit des à priori
Les résolutions au grand jour
Elle les massacre à pleine nuit
Un album qui peut laisser de marbre ou saisir son auditeur, comme beaucoup d’albums de Kent. Peut-être pas son meilleur, mais une heureuse retrouvaille nostalgique et poétique.