Cinéma - Les Lumières de la ville de Charlie Chaplin (1931)
Malgré son age avancé, ce film me fait toujours autant d’effet. Et pourtant, il n’y a toujours pas de dialogues.
Car en pleine effervescence autour du parlant, Charlie Chaplin n’ose toujours pas utiliser cette nouvelle technique. Après tout, c’est encore la plus grande star mondiale du cinéma mais il commence à se ringardiser. Il met pourtant tout le monde d’accord par ce long métrage de 87 minutes. «Un vagabond s’éprend d’une belle et jeune vendeuse de fleurs aveugle qui vit avec sa mère, couverte de dettes. Suite à un quiproquo, la fleuriste s’imagine le misérable, qui vient de lui acheter une fleur, en milliardaire…». Et nous sommes encore dans la grande dépression qui a mis tant de gens dans la rue aux USA et partout dans le monde. Traiter ainsi des classes sociales, de la misère, c’est aussi le fond de commerce de Charlot, le petit acteur anglais devenu riche par son art.
A chaque fois que je traite d’un film muet, je me demande ce qui pourrait convaincre de le regarder aujourd’hui. Car il y a quand même un style particulier, une vitesse de défilement et des gestes saccadés, en plus de l’absence de son, remplacé par la musique. Il faut donc accepter de mettre une partie de son cerveau en veille et faire travailler celui qui gère l’imaginaire tout la haut. Charlie Chaplin est au sommet de l’art de la Pantomime ou du mime, genre que l’on verra aussi chez un certain Marcel Marceau un peu plus tard dans nos théâtres. On doit beaucoup à Chaplin dans l’art de la comédie, comme celui de la danse…Mais revenons à l’histoire. C’est essentiellement une romance entre cette fleuriste (Virginia Cherrill) et notre vagabond. Face à eux, il y a le millionnaire suicidaire (Harry Myers) qui représente la victime du crash mais aussi la classe dominante qui regarde de haut les autres. Le film aligne pourtant les gags et sketchs sans que l’histoire en pâtisse. Cela fait aussi partie du style et nul besoin de dialogue pour rire. Pourtant, là où Chaplin fait fort, c’est qu’il nous émeut par son personnage, le regard qu’il porte à la fleuriste et tout ce qu’il fait. On ne croit pourtant pas à une happy end.
Evidemment, cette scène finale est incroyable et je m’en souviens comme au premier jour, tout comme le combat de boxe ou la scène du «suicide». C’est d’une telle précision, d’une telle justesse que l’on a du mal à imaginer les conditions de tournage de l’époque. Ok, Chaplin était aussi un tyran dans les tournages, ou un séducteur invétérés…(même des plus jeunes). Mais on oubliera tout cela pour se laisser encore une fois porter par cette histoire à la fois touchante et rocambolesque qui bouleversa nos aïeuls et leurs enfants, petits enfants…C’est aussi le chant du cygne de ce genre, la disparition de beaucoup d’acteurs et d’actrices. Comme souvent, la valeur de ce film est rehaussée par cet aspect fondateur et historique; Qu’importe, il reste pour moi un grand moment de cinéma.
Ce film fait partie du challenge IMDB Top250