Musique - Kavinsky - Outrun (2012)
Mis en lumière par le film Drive dont le titre “Nightcall” faisait partie de la bande son, Vincent Belorgey, alias Kavinsky, remet au goût du jour des sons électroniques typés année 80. Le hit “Road Game” en est un autre exemple et Histozic était impatient de se pencher sur l’album complet pour en décrypter les ficelles. Car comme Daft Punk, Kavinsky use du phénomène d’imprégnation sonore….
Mais revenons un instant sur Vincent Belorgey, acteur en même temps que musicien et DJ. Les années 2000 lui ont permis de trouver son style avec un goût très prononcé sur les sonorités synthétiques des années 80, la new wave et les jeux vidéos. Ce n’est pas un hasard si l’album s’appelle Outrun, du nom du jeu mythique de SEGA, créé par Yu Suzuki et dont la bande son tenait une place prépondérante. On la devait à Hiroshi Miyauchi / Hiroshi Kawaguchi, génie musical qui créera aussi les musiques si prenantes de Space Harrier, After Burner et qui reste une figure du genre “Chiptune”, soit la musique en 8bits. C’est donc dans cet univers que nous propulse Kavinsky dans ses productions, dont Testarossa Autodrive, là encore clin d’oeil au jeu vidéo Outrun. Ayant cotoyé des personnes du monde musical comme Mr Oizo ou Sebastien Tellier, qui marchent parfois mieux à l’export que dans notre propre pays, il n’est pas étonnant qu’il se retrouve sur la bande son de Drive du réalisateur danois Nicolas Winding Refn.
Le parallèle avec Daft Punk, qui emprunte aussi beaucoup aux jeux vidéos japonais et dessins animés des années 80, n’est pas un hasard puisque l’un des membres du duo casqué a produit Nightcall. L’album se veut un concept qui verrait un homme victime d’un accident de Testarossa, revenir 20 ans plus tard et composer de la musique. Les fans de Jan Hammer, auteur du thème de la série Miami Vice, trouveront aussi un parallèle évident, surtout que le héros conduisait une …. Testarossa. On le voit, les musiques font appels à des souvenirs de jeunesse de personnes entre 30 et 45 ans, et surfe à la fois sur le retour en grace de Miami Vice et le retro gaming et la mode Chiptune.
L’album commence comme une histoire avec une voix off dans le “Prélude”. Deux lignes de synthé et des “choeurs” synthétiques qui rappelle Jean-Michel Jarre font le reste pour une introduction grandiloquente. Il y a même un coté Kitsch assumé qui fait curieusement pensé à l’horrible Flash Gordon. “Blizzard” reste dans ces sonorités avec une ligne de guitare électrique pour un coté rock FM toujours typé années 80 et qui aurait pu finir en bande son de …Miami Vice. Mais il y a surtout un sample d’Eric Charden. Le refrain est on ne peut plus efficace. “Protovision” persiste dans cette veine retro que l’on jugeait has-been il y a encore quelques années. Mais que dire d’ “Odd Look” qui rappelle à la fois l’ Interstella 5555 / Discovery de Daft Punket y ajoute une voix déstructurée. “Rampage”, n’a rien à voir avec le jeu vidéo du même nom mais emprunte une musique à la bande son de Dragon Ball Z, composée par Shunsuke Kikuchi. Dommage que le morceau en devienne répétitif à l’excès. Suburbia fait une incursion dans le rap sur fond de sonorités synthétique. Très moyen car ne sachant pas vraiment de quel coté aller. Surtout que le très punchy “Testarossa Autodrive” prend place sur la piste suivante. Ici encore c’est un beau recyclage de sonorités de jeux vidéo sur une mélodie bien sentie avec un beat plutôt basique. “Deadcruiser” fait carrément dans le chiptune sur son introduction au point que l’on se demande si ce n’était pas dans un jeu vidéo de l’époque. D’ailleurs Nightcall commence avec un bruit de pièce dans un téléphone…à moins que cela soit dans une borne d’arcade. La voix digitalisée avec le choeur en fond se mèlent bien à une mélodie simple mais efficace. Mais on ne peut s’empécher de se demander si ce n’est pas le gimmick de fond au synthé qui fait le morceau ou le refrain éthéré. Grand Canyon revient à un son plus “Jan Hammer”. Trop de répétivité tue un peu l’efficacité du morceau qui tend au remplissage. “First Blood” est plus funky dans sa rythmique et très disco, se rapprochant là encore des productions neo disco des Daft Punk. “Road Game” se détache de l’album par l’utilisation de violons et d’une ligne de piano et d’un gimmick répétitif que Kavinsky fait varier avec délice. Le morceau s’avère captivant sans être totalement daté ce qui fait sa force. Amusant choix de titre pour terminer avec “Endless” qui rappelle encore des scènes nocturnes de Miami Vice, passées dans l’imaginaire collectif.
La force de Kavinsky et de sa production est donc de méler des sons qui ont bercés nos souvenirs. Stock Aitken et Waterman disaient que c’était les sons de la boite à musique qui faisaient le succès de leurs titres dans les années 80-90. Il faut croire que nos boites à musiques de l’époque étaient des bornes d’arcade, des consoles de jeu, et les dessins animés et titres new Wave. Qu’en sera-t-il dans 10 ans ? La musique aime se recycler de manière cyclique et Kavinsky l’a bien compris. On ne peut lui reprocher de le faire avec talent mais restera-t-il dans l’histoire de la musique comme ses glorieux inspirateurs ? Moins sur.