Cinéma - Cheval de Guerre de Steven Spielberg (2012)
Après le demi-fiasco de Tintin, on aurait pu croire Steven Spielberg sur la pente descendante… pensant plus aux effets spéciaux qu’à conter de belles histoires. Et le voilà qui sort un film surprenant axé sur un héros animal : un cheval !
Mais que le lecteur se rassure tout de suite : le héros n’acquière pas la parole.C’est juste un cheval, dans toute sa splendeur, à la manière du Bucéphale de l’Etalon Noir (1979). Toute l’histoire est centrée sur le cheval et sa vie tumultueuse et non sur un héros humain. Car Joey, ce jeune étalon né dans les highlands, va connaître de nombreux propriétaires. Voilà la toile de fond de plus de 2h00 de drame.
Drame, car le Cheval de guerre est loin d’être gai : un cheval arraché à sa mère qui souffre à labourer un champ stérile et… Non, n’en disons pas plus, préservons le suspens. On dira seulement que Spielberg emmène le spectateur en France dans les tranchées de la 1ère guerre mondiale. S’il semblait à l’aise (pardonnez l’expression) avec les combats d’“ll faut sauver le soldat Ryan, il choisit ici un autre point de vue, moins immersif et exubérant. Une remarquable scène de la charge à cheval est ainsi moins spectaculaire qu’émouvante et angoissante. Et c’est bien dans l’émotion que Spielberg donne le meilleur de lui-même plutôt que dans la froideur des effets spéciaux (trop) bien calibrés.
De l’émotion, le spectateur en ressent tout au long des épreuves que doit surmonter ce cheval qui mériterait presque un oscar pour la qualité de sa prestation (peut-être sont-ils plusieurs derrière ce rôle…). Entre amitié, complicité, malice, souffrance – son regard et ses postures montrent combien un animal peut transmettre d’émotion. Il y a un peu du Spielberg d’E.T. ou d’Amistad dans ce film. En outre, Spielberg compense largement son couplet sur l’héroïsme par de belles scènes sur les horreurs de la guerre et la solidarité que peuvent ressentir les ennemis d’un jour.
D’un point de vue technique, la musique sait se faire oublier tout en se rendant indispensable. Quant à la photo, elle est bien adaptée malgré un bémol sur l’excès déployé par la scène finale. A noter la présence d’Emily Watson (Breaking the Waves), David Thewlis (Harry Potter) et de Niels Arestrup (Un Prophète).
Du grand Spielberg, donc, pour un mélodrame qui risque de ne pas rencontrer de succès en France où ce genre est systématiquement descendu par les critiques* sous le prétexte qu’il fait appel à des ressorts que l’on appelle “humains” – la sensibilité, la compassion. C’est justement parce que ce genre tombe trop souvent dans des clichés qu’il est difficile à rendre et qu’il faut d’autant plus saluer une réussite. Les passionnés de chevaux apprécieront. Même si le film fait mal. Ou peut être aussi pour cela. Il serait dommage qu’ils soient les seuls à le regarder.